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premier moment où il avait été question du voyage de M. Loubet, le Saint-Siège nous avait fait savoir comment il l’apprécierait. Il nous a appris de plus, — ce qui était répudier les commentaires faits par les journaux, et qu’ils n’avaient pas inventés tout seuls, — que l’offense du Saint-Siège à la France n’était pas la fameuse phrase comprise dans le texte à l’usage des autres puissances et omise dans le nôtre, mais bien la communication à des tiers d’un document qui n’aurait dû être adressé, et qu’on avait cru d’abord n’avoir été adressé qu’à nous. L’explication de notre volte-face en devenait plus admissible : on commençait à comprendre sous quel prétexte M. Nisard avait été rappelé. Mais ce que M. le ministre des Affaires étrangères ne nous a pas appris, c’est si M. Nisard rejoindrait son poste au bout d’un certain temps, ou si son rappel devait être considéré comme irrévocable, c’est-à-dire comme le prologue de la suppression de notre ambassade. M. Combes devait-il être plus explicite sur ce point particulier, le seul qu’aient traité tous les orateurs qui se sont suivis à la tribune ? Sa réserve a été encore plus grande que celle de M. Delcassé, et nous sommes surpris que personne ne fait obligé à en sortir. Il s’est contenté de faire une charge à fond contre le pouvoir temporel : on aurait cru qu’il parlait devant le parlement italien que cela intéresse plus que le nôtre. C’est, en effet, à l’Italie de préférence à la France que s’adresse légitimement à ce sujet la protestation pontificale, puisque ce n’est pas nous qui avons pris ses États au Pape, et qu’il ne dépend pas de nous de les lui restituer. Au surplus, si la question regarde plus spécialement le Saint-Siège et l’Italie, le langage de M. le président du Conseil n’en est que plus déplacé. Pour un homme aussi susceptible et aussi chatouilleux qu’il l’est lorsqu’on se mêle de ses affaires, il parle de celles des autres comme s’il ne leur reconnaissait pas le droit d’éprouver le même sentiment. Quelle impertinente désinvolture. Si la note pontificale n’est pas conçue dans les termes les plus heureux, que dire de son discours ? Mais M. Combes voulait donner une satisfaction à ses amis, et ne pouvant pas le faire sur la question de notre ambassadeur, qui reste réservée, il a trouvé commode de parler du pouvoir temporel. Les applaudissemens bruyans des socialistes et des radicaux ont assuré le plein succès de cette diversion. Leur joie a été si vive qu’ils n’ont plus songé à autre chose, et c’est seulement le lendemain que quelques-uns d’entre eux se sont aperçus que M. Combes n’avait rien dit du caractère provisoire ou définitif du rappel de M. Nisard.

Si nous interrogeons à ce sujet M. Briand et M. Ribot, ils