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la moindre valeur au-delà de ce terme : « Notre alliance avec les puissances actuellement en guerre avec la France prenant son commencement le 11, nous ne recevrons, au-delà de ce terme, plus de communications qui nous soient adressées séparément[1]. » Il prononça ces mots : notre alliance avec les puissances actuellement en guerre avec la France ; il dit à quelles conditions le refus de Napoléon amènerait l’Autriche à passer à la coalition ; il ne dit point qu’il s’engageait à obtenir, des alliés les conditions notifiées à Napoléon, ni que les alliés ne prétendraient pas donner à la paix « une plus grande étendue ; » il n’eut garde de s’expliquer sur la question de savoir si les points de l’ultimatum constituaient des préliminaires ou un traité définitif, ni sur cette autre question plus urgente encore, si Napoléon, qui, en disant non, aurait la guerre, serait sûr, en disant oui, d’obtenir la paix immédiate aux conditions de l’ultimatum. Les termes de cet ultimatum : « Conditions que les cours de Russie et de Prusse paraissent mettre à des arrangemens pacifiques, » annonçaient le contraire, et, pour qui savait lire cette déclaration, ne signifiait que deux choses : des préliminaires susceptibles de développemens ultérieurs, alliance conditionnelle peut-être, mais alliance conclue entre l’Autriche et les alliés.

Caulaincourt discerna-t-il ce dessous des choses ? Il n’hésita pas à croire la paix possible, à considérer la paix comme faite par le seul oui de Napoléon, et ce oui, il pressa l’Empereur de le prononcer. « Sans doute Sa Majesté verra dans cet ultimatum quelques sacrifices d’amour-propre, mais la France n’en fera pas de réel… Les heures sont maintenant comptées[2]… » Et à Maret, le lendemain, 9 août : « Toute cette affaire a été mal menée. Ne voulant jamais rien céder à temps, on gâte tout et on perd tout… » Metternich tenait les alliés au courant. Comme Humboldt montrait quelque inquiétude : « On me répondit, écrit-il à son gouvernement, que, le 11, la guerre serait toujours déclarée, quelles que fussent les réponses de Napoléon ; que l’empereur d’Autriche ne voulait ni alliance avec la France, ni neutralité, qu’il embrassait entièrement la cause de la Prusse et de la Russie. »

Une réponse, même, était-elle encore possible ? Le rapport de Caulaincourt n’arriva à Dresde que le 9 août, à trois heures de

  1. Metternich à Stadion, 8 août 1813.
  2. Caulaincourt à Napoléon, 8 août 1813.