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inattendues pour eux : les anciennes limites : , « L’empereur Napoléon a voulu faire admettre les bases de Francfort en signant un armistice. Ces bases sont les mêmes que celles de Châtillon, excepté que ces dernières sont détaillées et que les autres ne l’étaient pas. »

Les conférences furent reprises le 10 mars. Caulaincourt produisit à l’appui de ses réclamations « la note dictée à M. de Saint-Aignan, avec la lettre de M. de Metternich qui établit l’authenticité de cette pièce. » Alléguer les bases de Francfort, prétendre en établir l’authenticité, c’était, inévitablement, soulever un orage. « Une discussion des plus vives s’est élevée… On a représenté que ce n’était point la réponse à laquelle on devait s’attendre,… qu’il fallait se décider. » Un des Anglais réclama un contre-projet ; Caulaincourt répliqua sur tous les articles[1]. « La Conférence est devenue de plus en plus orageuse. Les plénipotentiaires anglais paraissent fort décidés à rompre, écrit-il. Lord Aberdeen a été le plus modéré de toute l’assemblée, et même le seul. » « Est-ce un refus de nos conditions de paix ? » demanda Stadion. Caulaincourt ne le laissa pas même achever sa phrase : « Ce n’est point un refus ; la France ne refuse rien ; ce sont des observations qu’il présente à la considération des plénipotentiaires. » On en disputa, académiquement, quelque temps, puis, les alliés faisant mine de se lever, Caulaincourt tira de ses papiers une feuille dont il donna lecture, en forme de déclaration verbale : Napoléon est prêt à renoncer à tous titres exprimant des rapports de souveraineté, de suprématie, de protection, de médiation ; à reconnaître le rétablissement des Bourbons en Espagne, l’indépendance de l’Italie, de la Suisse, de l’Allemagne, de la Hollande, donnée au prince d’Orange, des cessions de colonies moyennant compensation : mais il réclame les limites naturelles, et il rappelle les expressions mêmes de la déclaration de Francfort, en abdiquant « la prépondérance hors des limites de son empire. »

Les alliés demandèrent à en référer. « Je crois, écrivit Stadion, que, pour des hommes de paille, nous avons fait au-delà de ce qu’on devait attendre. » On se réunit de nouveau le 13 mars, et la discussion se rouvrit encore une fois sur les bases de Francfort. Cette fois, les alliés jugèrent indispensable de

  1. Caulaincourt à l’Empereur, 11 mars 1814.