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remède : diverses corporations s’efforcent d’exciter par des récompenses les inventions favorables au rouissage et au teillage, et divers essais ont été tentés, avec plus ou moins de succès, mais sans que rien de bien pratique ait encore été trouvé. L’installation d’un rouissage industriel est fort coûteuse, ses opérations non moins coûteuses, les chances d’un bon résultat, mesuré au rendement en fibre, toujours douteuses. Une matière première d’une valeur en elle-même minime a besoin de manipulations simples et ne la grevant point d’une surtaxe lourde. Mais, si le rendement est incertain, la fibre alors revient cher, et il faudrait qu’elle ne fût pas chère pour que le lin français pût lutter d’une part contre les lins étrangers et d’autre part contre le coton.

Cette explication préalable donnée, — et elle intéresse de tout près les ouvriers qui, même dans la filature et le tissage, vivent du travail du lin, — entrons, dans une de ces usines où, de France ou de Russie, de chez nous ou d’ailleurs, le lin arrive roui et teille. C’est un vaste atelier, ou plutôt ce sont de vastes ateliers, comme Roland voulait que lussent, pour être des « usines, » les forges et les fonderies ; et, dès le seuil, on a, comme dans les fonderies et les forges, l’impression de la grandeur Mais l’on n’a pas au même degré l’impression de la puissance ; ici, ce n’est pas la force, c’est l’adresse qui est reine : habileté précise et agilité ; au lieu d’un poing énorme qui tombe, des milliers de doigts menus qui courent : toute la différence de la broche ou de l’aiguille au marteau-pilon. L’air est ou d’une humidité chaude et pesante, ainsi que dans les serres réservées à certaines plantes tropicales, ou chargé et comme embrumé de poussière, suivant qu’il s’agit de « filature au mouillé » ou de « filature au sec. »

Du reste, qu’il s’agisse de l’une ou de l’autre, l’organisation du travail est identique. Le travail est divisé entre les cinq catégories suivantes : peignage, cardage, préparation, filature (filage), dévidage. Les services accessoires sont représentés par l’atelier des mécaniciens, les magasins, etc. On distingue, au peignage : les garçons de machines ou presseurs, les partageurs et émoucheteurs, les repasseurs, les peigneurs ; à la préparation : les étirageuses, les étaleuses, les banc-brocheuses ; à la filature, les démonteuses, les metteuses en ordre, les fiieuses. Le personnel dirigeant se compose, — et c’est, dans les établissemens de ce genre, la composition ordinaire, — d’un directeur, d’un