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Mme de Sévigné, lui fait des visites, et toute la famille tour à tour. Elle passe nettement devant toutes les duchesses (3 juillet 1675). »

Il y avait eu un temps où cette façon de faire litière des rangs aurait indigné la Grande Mademoiselle. Mais ce temps était loin, plus loin qu’elle-même ne se le figurait. En 1667, elle avait encore crié très haut parce que sa seconde sœur, Mlle d’Alençon, s’était mésalliée en épousant un simple grand seigneur, le duc de Guise, et elle avait fait grise mine aux mariés. Mademoiselle n’avait plus le droit d’être si fière, car elle-même était mûre pour les mésalliances. Sa patience était à bout. On n’a pas oublié son agitation pendant que Louis XIV négociait son mariage avec le Duc de Savoie. Aucun prince n’avait pensé à elle depuis cet affront. Ils la trouvaient tous trop vieille. Elle ne se l’avouait pas, elle le sentait, et une tempête s’amassait au fond de son cœur.

La crise éclata en 1669. Il est impossible de dire dans quelle mesure la nature en fut responsable, et ce qui en revenait à l’atmosphère de désordre moral et d’élémens voluptueux que Mademoiselle respirait maintenant à la Cour, dans la compagnie habituelle de la favorite. Une seule chose est certaine : la Grande Mademoiselle n’essaya pas de lutter contre la passion ; son attitude fut plutôt celle d’une personne qui la cherchait.


ARVEDE BARINE.