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unie à la vallée du Rhône, penche vers la Méditerranée. Dès les « marches » de cette région, à des extrémités opposées de la Drôme, des Alpes-Maritimes, de l’Aude, on sent passer un souffle plus impérieux.

A Valence, bien que la ville ait peu d’ouvriers, l’agitation de Lyon se propage, et, le 4 septembre, avant onze heures du matin, le préfet impérial a déjà dû dissiper plusieurs manifestations. A quatre heures du soir, avant de connaître les événemens de Paris, les adversaires de l’Empire, appuyés sur le conseil municipal, ont assez d’impatience pour courir le risque et proclamer la République. Les chefs du parti républicain, eux-mêmes dirigés par l’avocat Malens, se déclarent « Comité exécutif » et s’imposent au préfet, tandis que le conseil municipal destitue et remplace le maire, les adjoints, et que la garde mobile se mutine contre ses officiers. Malens, dès qu’il connaît la révolution de Paris, annonce à Paris celle de Valence, et, en homme qui n’aime pas à attendre, télégraphie, le S avant midi : « D’où vient qu’aucune réponse n’a été faite au comité exécutif de la Drôme ? » Le lendemain le comité cesse de la demander et avertit en ces termes qu’il s’en passera : « Nous n’accepterons pas une longue coopération de fonctionnaires impériaux ». Le 4, il s’installait près du préfet pour collaborer avec lui ; le 5, il prétend le remplacer ; le 6, il l’expulse. Malens révoque de même le secrétaire général, les conseillers de préfecture, exige que toutes les dépêches de service adressées aux fonctionnaires lui soient remises, accorde à la garde mobile l’élection des officiers. Tout plierait devant lui, sans la résistance d’un règlement plus inflexible que les hommes. Les fonds de l’Etat ne peuvent être gérés que par des mandataires réguliers ; quand Malens veut engager les dépenses nécessaires aux services publics, les agens des finances, qui deviendraient responsables s’ils cédaient, refusent. Il lui faut donc être investi par le gouvernement, auquel il mande, le 7 septembre, « l’urgence de donner la signature au président du comité. » Le gouvernement préfère la donner, avec le titre de préfet, à Peigné qui, étranger à la Drôme et gendre de Crémieux, aura deux raisons pour une d’être docile et sûr. A son arrivée, Peigné résume la situation en ces mots : « Bien reçu par tous, Malens excepté : il voulait être préfet. » Mais si Peigné, pour rester maître, déclare que « l’administration préfectorale doit être composée d’étrangers, » il estime « très important