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vitalité de la nation et de la race. Les Russes n’ont jamais manqué une occasion de faire servir leur marine marchande au succès de leur politique.

En 1869, deux de ses plus beaux paquebots ont figure à l’inauguration du canal de Suez, et nous nous souvenons de les avoir vus et visités à Port-Saïd. L’année suivante, se hâtant de mettre à profit la nouvelle voie ouverte au commerce, la Compagnie de navigation établit un service sur les divers ports des Indes et de la Chine. Pendant la guerre de 1877, à la suite de laquelle l’insuffisance de la marine de guerre russe se fit, comme on le verra, si cruellement sentir, quatre navires de la Compagnie de navigation remplirent avec succès le rôle de croiseurs auxiliaires et se signalèrent dans des combats, ainsi que par des prises importantes. Après le traité de Berlin, la flotte de cette Compagnie se fit apprécier comme flotte de « transports, » en rapatriant 138 000 soldats et 22 000 chevaux du corps expéditionnaire[1].

A Odessa, son port d’attache, la Compagnie possède, outre un dock flottant et un dépôt de pétrole, toute une organisation pour l’entretien et la réparation de ses navires : un bassin de radoub, des ateliers mécaniques et une scierie à vapeur. Nous parlerons plus loin des chantiers de constructions navales qu’elle entretenait à Sébastopol.

La Compagnie russe exploite deux sortes de lignes de navigation : des lignes subventionnées et des lignes libres. En vertu d’un contrat passé avec le gouvernement en 1891, et valable pour quinze ans, c’est-à-dire jusqu’au 31 décembre 1905, elle reçoit une subvention annuelle de 116 000 roubles pour l’exploitation de services réguliers, hebdomadaires ou bimensuels, sur Constantinople, Alexandrie, Port-Saïd, les ports de Syrie, le Pirée, Smyrne, les ports d’Anatolie, du Caucase et de Crimée ; au total, six lignes subventionnées, trois directes, auxquelles sont consacrés ses plus beaux navires, et trois circulaires. Les primes sont calculées sur un taux variant entre 1 rouble 75 et 2 roubles

  1. Cette flotte compte aujourd’hui 77 unités, dont 36 paquebots-poste, 8 navires pour passagers et marchandises, 23 cargo-boats, 3 tank-steamers pour le transport du pétrole et 7 remorqueurs, formant un tonnage total de 188 450 tonnes. Dans ce nombre, on compte trois bateaux de 7 000 tonnes et d’une force de 3 400 chevaux-vapeur, douze de 6 000 à 3 000 tonnes, cinq de 2 500 tonnes chacun ; tous sont confortablement aménagés, tiennent bien la mer et filent à une vitesse honorable : leurs qualités les font rechercher des passagers sur les lignes d’Orient.