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tous les grands industriels et négocians de l’Empire une circulaire spéciale, pour les engager à favoriser par tous les moyens en leur pouvoir l’établissement de services maritimes directs entre Odessa et les ports de la mer d’Oman et du golfe Persique. Ces services devaient sûrement, suivant l’opinion exprimée par la Compagnie, contribuer, non seulement à introduire le pavillon russe dans ces parages, presque exclusivement fréquentés par le pavillon anglais, mais encore à ouvrir des débouchés nouveaux aux produits du commerce et de l’industrie russes, et à créer un rapprochement plein de promesses entre le producteur russe et le consommateur persan. Les essais tentés, depuis deux ans déjà, par la Compagnie elle-même, l’avaient encouragée à penser que cette entreprise, à condition d’être bien organisée, soutenue par le concours absolu des représentans de l’industrie et du commerce nationaux, mettrait les produits russes à même de lutter avantageusement contre les produits anglais. Pour faire connaître les produits de la Russie aux consommateurs persans, la Compagnie avait donc décidé de créer, dans les ports les plus importans du golfe Persique et de la mer d’Oman, à Bouchir, à Bassorah par exemple, des musées commerciaux qui porteraient le nom de « musées russes, » et présenteraient des collections complètes d’articles d’exportation avec indication de leur prix, frais de port compris, et de la maison qui les fabrique ou qui les vend. À ces musées seraient attachés des agens munis d’instructions spéciales.

C’est à juste titre que cette information a éveillé l’attention en France et en Angleterre, où presque tous les journaux l’ont signalée. Elle a été considérée avec raison comme une nouvelle manifestation des visées politiques que la Russie avait sur la Perse. Effectivement, c’était un nouvel exemple de la constante coopération de la marine marchande à l’œuvre politique. Sur aucun point, croyons-nous, l’association n’a été plus manifeste entre l’œuvre maritime et l’ensemble du plan politique et économique. A l’époque où les Russes avaient les yeux tournés vers Constantinople et vers le Bosphore, où la Mer-Noire. l’Archipel et la Méditerranée orientale absorbaient presque exclusivement leur attention, la fondation de la Compagnie russe répondait à ces préoccupations. Aujourd’hui que l’objectif de la politique russe s’est déplacé, nous voyons cette même Compagnie mettre son activité au service des nouvelles tendances de son gouvernement. La politique russe en effet n’est plus ce qu’elle était,