Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 28.djvu/162

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LES VILLES AFRICAINES

II
THIMGAD

Le contraste est frappant entre Cherchell et Thimgad.

C’est bien toujours la même Afrique et le même soleil, mais les deux villes et les régions qui les environnent sont si différentes ! Cherchell est maurétanienne, Thimgad est numide. A l’abri de ses collines doucement mamelonnées, sous les verdures de ses orangers et de ses citronniers, la campagne de Césarée est un grand jardin, comme d’ailleurs tout le Sahel, depuis Alger jusqu’à Ténès, L’immense plaine numide, qui va de Sétif à la chaîne de l’Aurès, n’a pas cette grâce un peu molle : c’est un champ de blé qui ondule à perte de vue. Le paysage est sévère, parfois rude, ou tristement monotone. Bâtie à l’extrême lisière de ce Tell, dans un pays déjà plus pastoral qu’agricole, Thimgad annonce le voisinage des steppes arides et des sables désertiques. Tandis que Cherchell, — d’abord escale phénicienne, puis résidence des rois maures, — est le municipe provincial peuplé de fonctionnaires civils et de riches indigènes, lentement embelli par ses princes ou ses décurions, — Thimgad est une cité sans histoire, une colonie militaire élevée d’un seul coup par la main-d’œuvre des soldats. De là, une certaine raideur administrative qui sent la discipline et la caserne, mais qu’on oublie bien vite, tant cette impression s’efface sous le prestige dominateur de la majesté romaine !