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avons mis, il en contient seulement les élémens, les ions, tels que l’électrolyse pourrait les fournir. Dans l’acide chlorhydrique très dilué, par exemple, les ions hydrogène, c’est-à-dire les atomes d’hydrogène chargés d’électricité positive, nagent librement, escortés par les anions chlore. Telle est la doctrine du savant suédois.

Arrhenius a donc supposé que dans les solutions extrêmement diluées de sels, acides et bases, l’ionisation est complète, que les molécules ordinaires y font défaut et que les ions y subsistent seuls. Dans les solutions plus concentrées les ions coexistent à côté des molécules ordinaires non dissociées. Le degré relatif de cette dissociation présente nécessairement une certaine constance ; la proportion des molécules disloquées en ions aux molécules restées intactes ne peut être arbitraire : elle est réglée. Ce n’est pas introduire une hypothèse nouvelle que d’affirmer cette idée d’une proportion déterminée, réglée, qui existerait entre la partie intacte et la partie dissociée, entre le nombre des molécules ordinaires et celui des ions. Il y a certainement là un équilibre exactement déterminé. Mais c’est faire certainement une supposition supplémentaire que d’imaginer avec Arrhenius et Ostwald que cet équilibre doit être entendu au sens ordinaire des équilibres chimiques réversibles et obéir en conséquence à la loi particulière qui régit cette espèce d’équilibres. Cette loi est connue dans la chimie nouvelle sous les noms de loi de Gudberg et Waage, ou encore de loi de Wenzel, ou de loi des concentrations. Supposons que l’on adopte cette troisième hypothèse, — d’ailleurs vraisemblable, — de la réversibilité de l’équilibre entre les ions et les molécules intactes : acceptons même que les proportions des trois espèces d’élémens, cations, anions et molécules obéissent à la loi des concentrations. Au moment de l’équilibre la concentration en anions, multipliée par la concentration en cations, donnerait un produit égal, à une constante près, à la concentration en molécules complètes. De ces hypothèses, expérimentalement vérifiées, d’ailleurs, découlent d’intéressantes conséquences. On pourra prévoir, par exemple, que dans telle ou telle circonstance, les ions se transformeront en molécules ordinaires et inversement. Si, par un artifice quelconque, on vient à faire augmenter, dans la solution, les ions d’une espèce, les ions d’une autre espèce devront diminuer et cela ne pourra advenir que si ces derniers ions repassent à l’état de molécules en s’unissant à des ions contraires. Pour prendre l’exemple proposé par Victor Henry, considérons une solution d’acide acétique. C’est un acide moyennement fort : on estime qu’en dissolution dans l’eau, la