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Venons-en à présent aux propositions. Elles peuvent être considérées de deux façons :

1° D’une façon absolue, c’est-à-dire selon la conception personnelle que je m’en fais et dans l’hypothèse que les autres membres du gouvernement et le pays puissent être amenés à partager mes convictions ;

2° D’une façon relative, c’est-à-dire par rapport seulement à ce qui est immédiatement praticable et possible, en tenant compte drs difficultés qu’on rencontrerait de la part des autorités et de l’opinion publique des différentes parties de l’Italie, comme des traditions locales, surtout à Turin, à Naples et en Sicile. En effet, il ne faut pas se dissimuler, d’un côté les conséquences immenses de la révolution que nous voudrions opérer, et de l’autre, les préjugés fortement enracinés dans les écoles, au barreau, dans le Parlement, chez les personnes même les plus cultivées et les plus libérales, quant aux périls d’une pleine liberté accordée à l’Église. Je ne partage pas ces préjugés, je ne redoute la liberté en aucune de ses applications. Je puis promettre de promouvoir, avec l’énergie dont je suis capable, la mise en œuvre de ces principes ; je dirai plus, j’espère réussir ; mais je ne puis répondre dès aujourd’hui d’une manière positive du succès, ou au moins du succès complet.


Mais voici mieux que des mots : voici un texte qui, accepté par le Saint-Siège, eût pu devenir un acte diplomatique, engageant et liant l’Italie. Cavour n’y va certainement que jusqu’où il veut aller ; il n’y dit que ce qu’il veut dire. Or il dit (dans la colonne de gauche sont les propositions de Pantaleoni, et dans la colonne de droite les observations du comte) :


Conditions à convenir pour l’indépendance spirituelle du Pontife et dans l’exercice de son autorité spirituelle sur le monde catholique.

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PROPOSITIONS DE PANTALEONI OBSERVATIONS DE CAVOUR
1. Le Pape sera reconnu comme souverain nominal, bien que sa souveraineté ne s’exerce sur aucun territoire. J’approuve.
2. En conséquence sa personne sera inviolable, et non sujette, même civilement, d’un autre prince. J’approuve.
3. A double titre de due compensation et de gratitude et vénération nationale, il lui sera assigné en propre telle masse de biens immobiliers qui d’un commun accord paraîtra suffire non seulement aux nécessités, mais encore au decorum du Souverain Pontife et de sa cour. J’approuve le principe, mais je réserve la discussion quant à la nature des biens je ne crois pas indispensable que ces biens soient tous immobiliers, ni que tous soient situés en Italie. Il me semble même qu’il conviendrait à la dignité et à l’indépendance du Pontife qu’il eût des biens ailleurs encore et qu’il pût disposer à son gré, c’est-à-dire en immeubles ou en meubles, de tout ce qui lui serait assigné.