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Le fermage est l’exploitation faite par un tiers de la propriété d’autrui, moyennant le paiement d’une redevance fixe, en nature ou en argent. Autrefois il était presque toujours fixé et payé en grain ; ensuite, il fut fixé en grain, mais payé en ai-gent, d’après les mercuriales du marché le plus voisin ; aujourd’hui, sauf pour les terres grevées du droit de marché, le prix est exprimé en argent. En sus de la redevance principale, les baux stipulent souvent des redevances accessoires en nature, qu’on appelle, suivant les régions : menus suffrages, faisances, outres, prestations ; et qui consistent en charrois, beurre, œufs, fromages, volailles, fruits, pommes de terre, etc. A Pey (Landes), où ces usages semblent se maintenir, le preneur porte au bailleur, à titre d’étrennes le 1er janvier « une paire de chapons, deux paires de poulets, deux douzaines d’œufs, quatre balais, dont deux grands et deux petits. » Dans beaucoup de baux, le propriétaire oblige le fermier à supporter les impôts de la ferme ; en Normandie, la redevance est plus ou moins élevée, selon que le bailleur a loué l’herbage avec ou ‘sans les pommes à cidre ; en Savoie, les propriétaires se réservent parfois une partie du fruit des arbres.

Les baux sont infiniment trop courts, rarement d’une durée supérieure à neuf ans, et les conséquences éclatent à tous les yeux. Si la monnaie est un bon soldat, l’intérêt personnel est un général infaillible ; aussi quand il voit dans la campagne un champ mal tenu, portant une mince récolte, l’initié murmure avec un dédaigneux sourire : « Oh ! il ne faut pas y faire attention, c’est un champ de ferme. « La Saint-Martin (11 novembre), la Noël (25 décembre), la Saint-Georges (23 avril), et la Saint- Jean (24 juin) sont les dates de paiemens les plus usitées : et puis encore, la Saint-André (30 novembre), la Saint-Michel (29 septembre), la Marchesque (29 mars)[1]. Les dates d’entrée en jouissance correspondent à des époques où, l’année culturale étant achevée, la transition d’un fermier à l’autre peut se faire aisément : la Saint-Georges, la Saint-Mathieu, la Toussaint, la Saint-Martin.

  1. Autrefois le fermier venait payer son rentaire chez le bailleur ; celui-ci l’invitait à dîner, lui quittait souvent deux, trois écus, donnait quelques vêtemens pour les enfans ; d’où plus de douceur, de sympathie confiante dans les rapports : aujourd’hui beaucoup de fermages sont payés chez les notaires ou envoyés par la poste.