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la même valeur que les siens. La première chambre, où les Libéraux avaient gardé la majorité, s’opposant à ces vues, M. Kuyper a attendu le moment favorable pour la dissoudre, et y a procédé aussitôt que les élections des États provinciaux, qui l’élisent au second degré, lui ont donné l’espoir d’y déplacer la majorité. C’est ce qui est arrivé, en effet, et la réforme a été votée.

On voit par là quelle était l’énergie de M. Kuyper. Toutefois il n’était pas exclusif, puisqu’il admettait sur le même pied dans sa majorité catholiques et protestans : il n’en voulait pas à une religion déterminée, mais à l’absence de toute religion, qui devait, d’après lui, conduire à l’anarchie intellectuelle et à la révolution politique. Ces idées d’un caractère très absolu, servies par une volonté dominatrice, ont été tout le programme gouvernemental de M. Kuyper : elles lui ont suffi pendant quatre ans, et on a pu voir, par les dernières élections elles-mêmes, qu’elles ont conservé une prise très forte sur le pays. À la coalition anti-révolutionnaire et chrétienne de M. Kuyper les libéraux en ont opposé une autre où sont entrés les socialistes : bloc contre bloc ! Ils ont vaincu sous la direction de M. Borgesius. Mais, soit que le chiffre peu élevé de leur victoire n ait pas donné à la Couronne une indication bien claire, soit que des divisions se manifestent déjà parmi eux, la situation reste confuse et incertaine. On parle d’un cabinet d’affaires, qui ferait de l’apaisement, en laissant tomber les projets les plus combattus de M. Kuyper sans leur en substituer d’autres. Cette solution, toute provisoire, serait peut-être la meilleure ; mais elle prouve combien M. le docteur Kuyper est difficile à remplacer.

FRANCIS CHARMES.

Le Directeur-Gérant

F. BRUNETIÈRE.