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provinces, au Turkestan et à la banlieue de Pékin ; chacune de ces régions doit avoir deux divisions comprenant douze bataillons d’infanterie, de la cavalerie, un régiment d’artillerie et une compagnie du génie, soit 12 000 hommes : le total ferait 480 000 hommes. En outre, des réserves sont prévues ; les hommes, après neuf années de service actif, resteraient trois ans dans la première réserve, astreints à deux mois d’exercices par an, et trois ans dans la seconde, astreints encore à quelques jours de présence sous les drapeaux. Mais pour entretenir une pareille armée, il faudrait un budget considérable ; faute de cette réforme capitale toutes les autres sont exposées à rester incomplètes et caduques ; on se heurte là à de très grosses difficultés, à des traditions antiques, à des lois vénérables, à la conception collective de la propriété et à l’organisation coopérative de la production. Cependant le courant réformiste est si fort que l’on ne saurait manquer de trouver un biais pour se procurer les disponibilités budgétaires indispensables à l’organisation de l’armée et de l’administration ; on compte qu’en tout cas, d’ici à deux années, la Chine pourra mettre en ligne cent mille hommes de troupes bien armées et bien encadrées, commandées par un état-major japonais ou instruit à la japonaise[1]. A la même époque, l’achèvement de quelques-uns des chemins de fer en construction permettra de transporter plus rapidement les troupes vers les points menacés ; la marche sur Pékin d’un petit corps, comme celui qui délivra les légations en 1900, sera devenue impossible[2].

On est bien près d’être maître d’un pays quand on en tient la police. Les Japonais ont eu l’art de se faire confier l’organisation de la maréchaussée chinoise. Au commencement de 1902, le colonel Aoki, alors attaché militaire à la légation du Japon à Pékin, fut chargé par le Mandchou Na-Tung, général d’une « bannière » tartare et par le prince-à-casque-de-fer Sou, qui

  1. Les dernières nouvelles nous apprennent que, sur les pressantes instances des Japonais, la Chine va réorganiser sa marine : une sorte de ministère de la Marine sera créé à Tien-tsin ; des écoles navales seront organisées avec des professeurs japonais ; des escadres nouvelles seront construites. Tout le matériel et les officiers instructeurs viendront du Japon. La dépense annuelle est évaluée à 48 millions et, comme pour l’armée, la principale difficulté est de trouver cet argent. Tchang-Tche-Tong vient de commandera Kobé, pour la défense des Yang-tse 4 torpilleurs et 6 canonnières cuirassées.
  2. Encore convient-il de remarquer qu’en 1900 l’armée de Yuan, campée au Chantoung, y resta et ne vint pas combattre les étrangers.