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furent malmenés par les agens japonais qui leur enlevèrent sept passes de transit. Cette fois, les consuls et le ministre de la Grande-Bretagne se plaignirent si vivement qu’ils obtinrent gain de cause : le monopole du camphre fut aboli.

Momentanément battus sur ce point, les Japonais ont réussi sur d’autres. Ils sont intervenus avec tant d’astuce et de mauvaise foi dans les nombreux litiges auxquels donne lieu le commerce des bois dans le Fo-kien, ils ont exercé une telle pression sur le mandarin chargé du règlement de toutes ces contestations, qu’ils ont réussi à accaparer complètement cette branche très importante du commerce de la province. La maison anglaise Dodwell ayant monté, à Fou-tcheou, une fabrique d’allumettes, les Japonais se trouvèrent en mesure de boycotter la maison, d’empêcher les bois d’arriver jusqu’à l’usine et finalement d’arrêter la fabrication. A Fou-tcheou, ils sont aussi les maîtres de tous les monts-de-piété et les administrent dans l’intérêt de leur clientèle politique, comme s’ils étaient les souverains du pays. Un jour, notre consul ayant été victime d’un vol, demanda, selon l’usage, au chef de la police que des recherches fussent faites dans les monts-de-piété où les objets volés avaient dû être engagés ; le chef de la police répondit qu’il fallait, pour pouvoir faire des perquisitions, l’autorisation du consul du Japon, tous les monts-de-piété appartenant à des Japonais ; le représentant de la France refusa de se prêter à un pareil abus ; il ne revit jamais les objets volés. Tous les étrangers ont à se plaindre des procédés de la concurrence nippone, mais, au Fo-kien, ils dirigent surtout leurs manœuvres contre nos compatriotes ; ils supportent malaisément la présence de la mission française de l’arsenal, et ils travaillent à décourager nos nationaux de faire des affaires dans le pays. Un de nos ingénieurs, M. Coursier, représentant de la Société d’études du Fo-kien, avait, sur la demande des autorités chinoises, fait des études et préparé des devis pour l’adduction d’eau potable à Fou-tcheou ; l’affaire allait être conclue quand les Japonais l’apprennent ; aussitôt ils demandent à présenter, eux aussi, un projet ; ils font à la hâte quelques études, mais, faute d’argent, ils ne peuvent exécuter leurs plans ; ils n’en font pas moins une campagne si ardente que le projet français est écarté et qu’ils parviennent à se faire attribuer mille taëls d’indemnité pour leurs travaux et leurs peines ! A quelque temps de là, le même Français apprit que le vice-roi désirait réaliser un emprunt provincial de