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REVUES ÉTRANGÈRES

UNE VICTIME DE GOETHE : JEANNE ECKERMANN


Aus Gœthe’s Lebenskreise ; J. -P. Eckermann’s Nachlass, publié par M. F. Tewes, tome I, 1 vol. in-8o ; Berlin, librairie G. Reimer, 1905[1].


Il y avait à l’université de Gœttingue, en 1821, un étudiant en droit nommé Jean-Pierre Eckermann. Né en 1792, dans un village du Hanovre, où son père tenait un petit commerce, il avait été successivement berger, soldat, dessinateur, commis de bureau, et n’avait appris le latin qu’à vingt-cinq ans passés : mais son application au travail et son ambition naturelle, qui avait toujours été grande, s’étaient encore trouvées stimulées par la connaissance qu’il avait faite, à Hanovre, en 1818, d’une charmante jeune fille, avec laquelle il s’était fiancé dès l’année suivante. Cette jeune fille, Mlle Jeanne Bertram, plus jeune que lui de neuf ans, était pauvre, comme lui, mais d’excellente famille et fort bien élevée. Elle avait été touchée, sans doute, de l’effort obstiné d’Eckermann pour sortir de l’obscurité où semblait le condamner sa naissance ; et peut-être aussi avait-elle été conduite à l’amour par la compassion, ayant vu le jeune homme gravement malade, en danger de mort, pendant plusieurs mois. Le fait est qu’elle lui avait donné tout son cœur, et, avec l’approbation de ses parens, lui avait promis de devenir sa femme aussitôt qu’il

  1. Ce volume contient un grand nombre de lettres écrites par Eckermann à diverses personnes, ou reçues par lui ; et l’on pourrait en extraire maints détails curieux, en particulier, sur la société de Weimar durant les dernières années de la vie de Gœthe. Mais je vais devoir me borner, aujourd’hui, à analyser rapidement la correspondance d’Eckermann avec Jeanne Bertram.