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blanc y prédomine largement, et ce sang est tout entier d’origine espagnole. Suivant la pratique universellement admise par tous les pays sous l’ancien régime colonial, les Espagnols seuls avaient le droit d’entrer en Amérique. Au début, les sujets de la couronne de Castille prétendirent même que ce privilège devait leur être réservé, à l’exclusion des sujets de l’Aragon, parce qu’Isabelle de Castille avait seule pourvu aux frais de l’expédition de Colomb, sans que Ferdinand d’Aragon, son époux, y fût intervenu. Si cette thèse extrême fut rejetée, on interdit du moins l’entrée des colonies à tous les sujets des rois d’Espagne en dehors de la Péninsule et des Canaries : aux Flamands, aux Francs-Comtois, aux Italiens du Milanais et du royaume de Naples. Cet exclusivisme fut un malheur, qui priva le Nouveau Monde d’excellens colons. En Amérique, même l’esprit de privilège se continuait par la rivalité entre les « hijos del pais, » les fils du pays, les créoles blancs nés aux colonies et les gens venus d’Espagne, les Péninsulaires, surnommés gachupinos, hommes à souliers, qui se considéraient comme au-dessus des autres et monopolisaient toutes les grandes places, la métropole se défiant de la fidélité des créoles.

Il n’y a plus lieu, aujourd’hui, de faire cette distinction et presque toute la population blanche se compose de créoles. L’immigration a malheureusement été très faible depuis la proclamation de l’indépendance ; au recensement de 1900, le nombre des personnes résidant au Mexique et nées hors du territoire ne s’élevait qu’à 57 507, moindre que n’était cent ans plus tôt le nombre des Péninsulaires, qui atteignait 70 000. Parmi ces étrangers, 16 258 seulement sont Espagnols, 15 265 sont des Américains du Nord ; on trouve environ 6 000 Guatémaléens, 4 000 Français, un peu moins de 3 000 Anglais et à peu près autant de Cubains, 2 500 Allemands, et autant d’Italiens. Nos compatriotes tiennent dans ce petit groupe un rang aussi honorable par la qualité que par la quantité de ceux qui le composent. Une notable partie d’entre eux est formée de gens de la vallée de Barcelonnette, qui a monopolisé à Mexico la vente des étoffes et se fait remarquer par son esprit de solidarité.

C’est un fait curieux et regrettable, mais certain, que le Mexique perd aujourd’hui plus d’habitans par l’émigration qu’il ne reçoit d’immigrans. Beaucoup d’ouvriers agricoles et de gardiens de bestiaux, sans parler des chercheurs d’or, vont gagner