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les discute, à la Chambre, dans les journaux, dans les salons ou dans les cercles, hier encore au Sénat ; — et les opinions sont faites. Si nous exprimions aujourd’hui la nôtre, c’est un plaisir bien inutile que nous nous donnerions ; elle viendrait un peu tard ; nous convenons franchement qu’elle ne serait pas neuve ; et elle ne changerait rien aux choses. Mais la vraie question, — la question du jour, si je l’osais dire, — et la question de demain, c’est de savoir, quand la séparation sera votée, ce que fera l’Église ?

Car, cette loi de séparation, — qui, de son vrai nom, serait d’ailleurs appelée bien mieux une « loi de spoliation, » ou « de confiscation, » puisqu’il n’y est question pour l’État que de la manière la plus avantageuse de ne pas payer ses dettes, et d’enlever à l’Église ce qu’elle possède encore de biens, — j’ai entendu dire à quelques catholiques ardens qu’ils ne sauraient l’accepter ; et, tout en partageant les sentimens de juste révolte qu’ils exprimaient énergiquement par ce mot, j’avoue que je n’ai pas compris ce qu’ils voulaient dire. Comment, en effet, s’y prend-on pour ne pas accepter une loi ? et, dans l’espèce, le budget des cultes, par exemple, étant supprimé, quels moyens avons-nous d’obliger un ministère à le rétablir ? ou encore, quels moyens de reprendre Notre-Dame de Paris, quand une fois l’État, comme il a fait jadis du Panthéon, l’aura désaffectée ? Nous pourrons donc, si nous le voulons, protester contre la loi ; nous pourrons, par des voies légales, en poursuivre l’abrogation ; nous pourrons en dénoncer infatigablement les dispositions de haine et d’iniquité ; mais, puisqu’en attendant nous devrons la subir, et, bon gré mal gré, nous y soumettre, il ne servira de rien de dire que nous ne pouvons pas l’accepter ; — et au contraire il faudra tâcher de nous en accommoder.

Insistons, et expliquons-nous clairement sur ce point.

Nous étions, personnellement, et nous demeurons partisans du Concordat, pour toutes les raisons que l’on en a données, dans la presse ou à la tribune, et plus particulièrement, si l’on le veut, pour celles que le cardinal Mathieu et M. de Mun, dans leurs livres, ont si éloquemment développées. Nous en demeurons partisans comme catholiques et comme Français, comme Français autant que comme catholiques ; et aussi bien, nous ne doutons pas que, sous une forme ou sous une autre, on y revienne un jour, parce que, l’« Église libre dans l’État libre, »