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nécessaire de le présenter à nos lecteurs. Son ministère offre incontestablement plus de chances de durée que celui de M. Montero Rios. Cependant les divisions du parti libéral demeurent profondes ; les jalousies entre ses chefs continuent d’être actives ; il faut du temps pour former dans des partis des hommes devant lesquels tout le monde s’incline, comme étaient autrefois M. Canovas del Castillo et M. Sagasta. Mais, nous le répétons, s’il en est un qui paraisse appelé à jouer un jour ce rôle à la tête du parti libéral, c’est M. Moret. Il a déjà pour lui une grande expérience, une grande éloquence et une autorité croissante. Quant à la crise anglaise, nous n’en parlerons pas aujourd’hui : il nous faudrait plus de place qu’il ne nous en reste. Sir Henry Campbell Bannerman a rapidement formé son ministère. La question de savoir s’il entrerait ou s’il n’entrerait pas à la Chambre des lords, et s’il le ferait tout de suite ou plus tard, a fait naître quelques difficultés, qui ont été vite aplanies. Sir Henry reste pour le moment à la Chambre des communes, et le leader du parti libéral à la Chambre des lords sera lord Tweedmouth, ministre de la Marine.

Le dénouement de ces crises ne nous cause d’ailleurs aucune préoccupation. Les ministères qui s’en vont avaient eu à notre égard l’attitude la plus amicale, et nous savions pouvoir compter sur leur persévérance dans les voies où ils s’étaient engagés avec nous. Mais si les hommes s’en vont, leur politique reste : nous avons reçu, à cet égard, les assurances les plus nombreuses et les plus précises. Sir Edward Grey sera le continuateur de lord Lansdowne au Foreign Office, avec ses qualités propres, qu’il a déployées autrefois comme sous-secrétaire d’État au même département, et qui le désignaient depuis longtemps déjà à la confiance de son parti. En Espagne, le nouveau ministre des Affaires étrangères, M. le duc d’Almodovar, entend maintenir, lui aussi la politique de son prédécesseur : elle a l’approbation du Roi, de la nation, de tous les partis. Il y aura donc un changement très sensible dans la politique intérieure de l’Angleterre, et un changement moins important, peut-être faut-il dire seulement un raffermissement dans la politique libérale de l’Espagne au dedans ; mais rien ne sera changé au point de vue international. Et c’est ce que nous pouvions désirer et espérer de mieux.


FRANCIS CHARMES.


Le Directeur-Gérant,

F. BRUNETIERE.