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Un pareil détail dans les prévisions des dépenses et l’emploi des fonds avec le contrôle qui l’accompagnait, mettait Marie de Médicis dans l’impossibilité de détourner un seul écu de son budget.

Les 400 000 livres qui lui étaient données furent réparties en une douzaine de chapitres.

D’abord figuraient les dépenses de la maison elle-même, à savoir la nourriture du personnel et de Sa Majesté, ainsi que les fournitures matérielles : ceci comptait pour 156 000 livres et était dit : « dépenses de la chambre aux deniers. » Les gages du personnel proprement dit montaient au total de 72 213 livres, plus ceux des gens de l’écurie qui représentaient 14 264 livres, et ceux de la musique qui étaient de 9 000 livres. L’écurie, chevaux, carrosses et le reste, prenait 60 000 livres.

Marie de Médicis touchait 3 000 livres par mois pour ses menues dépenses personnelles, — nous dirions argent de poche. — C’étaient 36 000 livres par an, somme importante, puisque toutes les autres dépenses étaient par ailleurs payées. L’article des habits, costumes ordinaires et vêtements de fêtes, ballets, réceptions, confondu dans les dépenses afférentes à l’entretien de l’appartement de la princesse, portait le nom « d’argenterie ordinaire et argenterie pour la personne de la reine ; » le chiffre prévu était de 28 000 livres. Pour ses voyages, Marie avait droit à 17 500 livres, sur lesquelles elle pouvait prendre de quoi accorder quelques gratifications et des récompenses. Si la somme ne suffisait pas, elle était autorisée à imputer le surplus sur les 60 000 livres de l’écurie. Figuraient enfin à part, dans le budget, les pensions octroyées à la dame d’honneur, 6 000 livres, à la dame d’atour, 6 000, au chevalier d’honneur, 2 400, et enfin, l’indemnité, les « épices, » attribuées à Messieurs de la Chambre des comptes pour examiner la comptabilité de la souveraine, 1 446 livres.

Or en dix ans, de 1601 à 1610, Marie de Médicis n’a su rester dans les limites de ce budget de 400 000 livres qu’une seule fois, l’année qui a suivi celle de son mariage, 1602 ! Les neuf autres années elle les a dépassées dans des proportions surprenantes. Il semble que l’échelle de ses excédents trahisse quelque vague préoccupation, après une année de dépenses trop fortes, de revenir à une modération relative, soit qu’elle-même se trouve effrayée de l’allure de ses dépenses, soit que le roi se fâche ; puis, l’année suivante, le chiffre monte plus haut, la velléité, sinon d’économie, au moins de prudence, n’ayant pas duré. La première année, 1601,