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Président et du Congrès. C’est là que réside sans exception la volonté générale du peuple. Librement élus par les citoyens, ils exercent, conformément à leur Constitution et suivant nos propres principes, les pouvoirs qui leur sont délégués. »

Après avoir, en ces termes formels, rappelé ces principes, sauvegarde et base indiscutable des rapports internationaux, le ministre invitait son agent à se délier a de gens peu instruits ou très mal intentionnés » dont il avait été entouré et que l’on pouvait fort bien soupçonner d’être encouragés par les Anglais et les torys, très intéressés à rendre la France impopulaire, en donnant à sa mission un faux éclat plus propre à inspirer la jalousie que la confiance. « Ils vous ont fait accroire, ajoutait le ministre, que, si vous étiez arrivé directement à Philadelphie, vous n’auriez pas été reconnu. Ils ne savaient donc pas que, d’après la simple notification faite par votre prédécesseur (Ternant), la République a été formellement reconnue par les États-Unis — mesure qui entraîne nécessairement la reconnaissance du représentant envoyé par la République. » Était-il, d’ailleurs, permis d’oublier que, malgré la médiocrité de ses ressources pécuniaires, le gouvernement américain n’avait pas cessé « de faire des avances très considérables pour nous fournir des approvisionnemens, qu’il avait emprunté lui-même le montant de ces avances en Hollande, que jamais la France ne lui avait adressé une demande infructueuse et qu’elle avait toujours trouvé en lui les dispositions les plus amicales, jointes à cette politique sage et même timide qui convient à la situation et aux intérêts des États-Unis et qui caractérise particulièrement le général Washington ? »

Insistant plus énergiquement encore sur l’incorrection de l’attitude de Genet à l’égard du président des États-Unis, le ministre ajoutait : « Vous dites que Washington ne vous pardonne point vos succès et qu’il entrave votre marche de mille manières... Ebloui par une fausse popularité, vous avez éloigné de vous le seul homme qui doit être pour vous l’organe du peuple américain... Ce n’est pas par l’effervescence d’un zèle indiscret qu’on peut réussir près d’un peuple froid et calculateur, ce n’est pas surtout en compromettant ses intérêts les plus chers, sa tranquillité intérieure et extérieure. Je cherche en vain dans votre dépêche les traces d’une communication officielle avec les chefs du gouvernement ; je n’y trouve que les élans d’un homme qui, dès son arrivée, se jette