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UN AN DE POLITIQUE PONTIFICALE

CONSALVI AU CONGRÈS DE VIENNE

C’est toujours sans ennui qu’on pénètre dans les coulisses d’un congrès ; elles offrent beaucoup de charmes, et d’ordre très divers. Les visages s’y détendent, et les sourires s’y débrident ; les demi-mots y deviennent bavards, et les secrets y succombent, à proximité d’une bonne espionne qui a nom l’histoire. Mais pour ceux-là mêmes qu’intéressent médiocrement les grands ou petits soucis des négociateurs, il est assez piquant, là où l’on croyait trouver des diplomates, de rencontrer des hommes, d’autant plus alertes, d’autant plus vrais, d’autant plus hommes, qu’ils ont à se reposer des longues heures durant lesquelles ils furent diplomates. Dans la pénombre des coulisses, les majestés d’emprunt se font plus familières ; l’on dirait qu’elles s’oublient, et que, s’oubliant, elles se trahissent. Les surhommes en perruque qui, s’alignant autour d’un tapis vert, avaient tout à l’heure pleins pouvoirs sur l’humanité, se laissent aller, de bonne ou de mauvaise grâce, à retomber dans cette humanité ; et durant ces entr’actes où la vie reprend ses droits sur la pose, ils s’amusent quelquefois et nous amusent toujours. Les souvenirs de M. de la Garde Chambonas sur le Congrès de Vienne, publiés en ces dernières années par le comte Fleury[1], réservaient au lecteur ce genre d’attrait ; ils nous installaient aux alentours du Congrès, trop loin pour nous admettre à écouter, assez près pour nous

  1. Paris, Vivien.