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français, en le chargeant de chercher autre chose dans le droit commun. Quoiqu’il n’ait pas prononcé le mot, c’est bien au droit commun qu’il a fait allusion lorsqu’il a parlé des « moyens que le droit reconnaît à tous les citoyens. » Seulement, l’indication est bien vague, et on comprend que les évêques aient trouvé quelque difficulté à y donner suite. Ils ne connaissent que le droit commun français, c’est-à-dire l’ensemble de nos lois écrites, et ils n’y ont rien trouvé de plus favorable, ni même d’aussi favorable à l’exercice du culte que la loi de 1905. Le Pape, chef d’une institution internationale, entend sans doute le droit commun d’une manière très large. Il en connaît de très différens : qui sait s’il ne les réunit pas tous dans une synthèse supérieure, où sa pensée se plaît à trouver des facilités et des libertés plus grandes, et s’il ne confond pas avec le nôtre le droit commun des États-Unis, du Mexique, du Brésil, de l’Angleterre même où il faut toutefois, sur ce point, distinguer le droit écrit du droit coutumier ? N’y a-t-il pas, là encore, une nouvelle difficulté de s’entendre ? Le Pape défend beaucoup de choses, mais il n’en prescrit aucune. De leur côté, les évêques déclarent se soumettre, mais leur soumission n’est suivie d’aucune initiative. C’est un accord tout négatif. Le Pape demande aux évêques de trouver une solution : les évêques répondent qu’ils veulent ce que veut le Pape. Comment sortir de ce cercle qui, jusqu’ici du moins, semble sans issue ? Ne conviendrait-il donc pas que le Pape s’expliquât à nouveau ? Et, s’il consent à le faire, nous est-il permis de souhaiter respectueusement que ce soit avec une précision qui ne se contente pas de dire ce qu’il ne faut pas faire, mais encore ce qu’il veut qu’on fasse.

Les incertitudes au milieu desquelles nous nous débattons ne viennent pas seulement du côté de l’Église : elles ne sont pas moindres du côté de l’État. Ici et là, on parle fièrement, comme pour donner l’impression qu’on a un plan arrêté d’avance et que, quoi qu’il arrive, on n’en déviera pas d’une ligne. En réalité, on s’observe mutuellement avec anxiété ; chacun attend que la partie adverse ait fait un mouvement pour en faire un autre en conséquence ; mais personne ne bouge, et c’est ce qui rend si difficile de prévoir comment les choses sont destinées à évoluer. Cette immobilité est, du moins pour le moment, plus facile au gouvernement qu’à l’Église. Il n’a, lui, rien à faire jusqu’au 11 décembre : il peut attendre, en déclarant sur un ton péremptoire qu’il a prévu toutes les hypothèses et que ses dispositions sont prises à tout événement. N’a-t-il pas la loi en main, et la loi n’a-t-elle pas dit ce qu’on devrait faire dans le cas où il n’y