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la Fédération. Il ne présenterait aucun intérêt politique si on n’y eût introduit une clause dont la conséquence a été de désorganiser pendant plus d’une année le service régulier des correspondances de l’Australie avec l’Europe. Par cette clause (article 16), le gouvernement du Commonwealth s’interdisait de subventionner un service postal à moins que la Compagnie soumissionnaire eût pris l’engagement de ne pas employer d’hommes de couleur sur ses paquebots. On sait que le personnel des bâtimens qui se rendent d’Europe en Orient par la Mer-Rouge et l’océan Indien comprend généralement des chauffeurs arabes et des domestiques indous. Interdire cet usage aux paquebots-poste des lignes d’Australie devait compromettre le renouvellement des contrats en cours, auxquels jusqu’alors l’Angleterre et les colonies australiennes avaient participé à frais communs. Ces contrats, en effet, n’ont pas été renouvelés à leurs échéances. Après de longs tâtonnemens, on a dû recourir, pour réorganiser le service postal entre les deux pays, à des expédiens dont l’avenir fera connaître les mérites.

Cet article 16 avait été imposé, cela va sans dire, parle labour party. Il est curieux de constater que son insertion dans la loi ne correspond à aucun intérêt appréciable. Les paquebots-poste ne recrutent en Australie aucune fraction de leurs équipages. Les hommes de couleur embarqués à leurs bords ne font donc pas concurrence à la main-d’œuvre locale. En outre, ces individus sont en grande majorité sujets britanniques, ce qui eût dû les recommander à la bienveillance des Australiens. Malgré les objections du gouvernement anglais qui refusa, de son côté, à s’engager dans des contrats postaux excluant de plano les gens de couleur, le parti pris des socialistes resta inébranlable. C’était un second avertissement. Le troisième devait être plus sérieux.


IV

Il se présenta sous la forme de l’Immigration restriction bill, devenu loi du Commonwealth le 23 décembre 1901.

Les deux mots qui forment le titre de cette loi en indiquent bien l’objet, mais en adoucissent la portée. Il ne s’agissait pas seulement de restreindre l’immigration, déjà fort restreinte, mais de la supprimer, tout au moins de la décourager. Le problème était difficile à résoudre, car l’accès libre du territoire d’une