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pour contravention aux lois ; enfin, pour complaire à l’Institut, défense aux membres de l’ex-Académie française, qui, encouragés par Elisa Bacciochi et Fontanes, se sont reformés en société libre, de s’assembler sous un titre « propre à réveiller des institutions abolies. — Si cette association continue à prendre le titre ridicule d’Académie française et à suivre ses anciens statuts, l’intention du gouvernement est qu’elle soit sur-le-champ supprimée[1]. » De ces mots tranchans, Bonaparte coupe court au projet de rétablir l’Académie, quitte à la refaire lui-même plus tard en l’englobant dans l’Institut.

Sous le couvert de ces satisfactions accordées à l’esprit révolutionnaire, il va faire passer des mesures toute différentes et d’une portée plus vaste. Après l’espèce de coup de barre qu’il vient de donner à gauche, il prononce un mouvement en sens inverse. Tandis que la police se remet à inquiéter les émigrés et opère quelques arrestations sensationnelles, il rend au culte plus de latitude. Douze jours à peine se sont écoulés lorsqu’il rétablit intégralement la liberté du dimanche. Les arrêtés du 7 thermidor confèrent à tout citoyen non fonctionnaire la faculté légale de chômer à son gré le Décadi ou le dimanche. Le choix fut bientôt fait. A Paris, après beaucoup de bavardage et quelques oscillations, le gros de la population se laissa reprendre au courant des anciennes habitudes. Dans la France entière, le Décadi ne fut bientôt plus qu’un souvenir.

Envers les prêtres, les mesures libérales s’accentuent, plus ou moins accompagnées de restrictions. Réparant une omission cruelle, Bonaparte rappelle les prêtres déportés en Guyane après Fructidor, les derniers survivans de la Terreur sèche ; combien restait-il de ces malheureux pour profiter d’une justice retardataire ? L’arrêté ordonnait ostensiblement de les transférer à Oléron et permettait seulement par un artifice de rédaction de les rendre à la liberté. En revanche, voici d’audacieuses et cordiales paroles à l’adresse des populations catholiques de l’Ouest et de leurs pasteurs. Ordonnant de faire venir à Paris, pour leur rendre honneur, quelques humbles habitans de Vendée qui ont combattu un débarquement des Anglais et marché franchement à l’ennemi, Bonaparte ajoute : « Si parmi ceux qui se sont distingués il y a des prêtres, envoyez-les de préférence,

  1. Corr., 4982.