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celles que versent résèque de Soissons et le maréchal de Duras. Cette année-là le peintre exécuta, ou du moins vendit, 54 portraits à 580 francs en moyenne et 60 copies.

Ces copies, dont une lui fut payée 1 725 francs par un riche étranger, n’étaient pas en général tarifées à plus de 250 francs ; il en fournit cinq de l’évêque de Meaux pour 210 francs chacune et, tous les ans, il en cédait pour moins que cela et jusqu’à 165 francs. De 1705, c’est-à-dire un an après la mort de Bossuet, date le portrait en pied du grand orateur de la chaire qui, par une acquisition de Louis XVIII, en 1816, est entré au musée du Louvre[1].

Rigaud reçut pour cette toile 6 660 francs, à peu près le maximum de ce qu’il avait jusqu’alors demandé. Plus tard, sur la fin de sa vie, il lui arriva deux ou trois fois de prendre 8 000 francs, notamment au chancelier de l’Empereur et au cardinal d’Auvergne (1732). Des fermiers généraux, des gros marchands, des magistrats qui sollicitaient l’honneur d’avoir un portrait de sa main, il exigeait alors au moins 1 600 francs ; mais, à cette époque, il avait atteint les limites extrêmes de la vieillesse ; il ne travaillait presque plus et le produit annuel de son pinceau varie entre 9 000 et 13 000 francs. En 1729, le portrait de Louis XV, auquel il s’était exclusivement consacré durant douze mois, lui rapporta 40 500 francs.

Si l’on prend la moyenne de ses années les plus fructueuses et les plus remplies, de 1690 à 1730, en laissant de côté la période de jeunesse où il gagnait peu et la période de retraite où il ne peignait guère, on constate que Rigaud obtint en pleine faveur 30 000 francs environ par an, sur lesquels il lui fallait encore payer ses aides.

Il ne les payait pas cher du reste, comme on le voit par le « Mémoire de l’argent que j’ai donné des copies que j’ai fait faire. » L’un des acolytes chargés de ces « répliques » exécute un maréchal de Luxembourg pour 103 francs, un marquis d’Argenson et un évêque de Verdun pour 69 francs chacun, un maréchal de Noailles pour 34 francs et « sept copies du Roi » pour

  1. En 1705 le peintre fit 31 portraits pour 26430 francs, — 850 francs chacun, — et 20 copies, à 435 francs l’une dans l’autre, pour 8 000 francs. En 1710 les prix de Rigaud oscillent, de 500 francs pour le marquis de Torcy, ambassadeur en Espagne, à 3 300 francs pour le cardinal de Rohan. Le total de l’année est de 20 300 pour 34 portraits ; ce qui les fait ressortir en moyenne à 600 francs. En outre, le maître vendit 18 copies pour 7 100 francs soit 390 francs par copie.