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et très distingué ministre des Affaires étrangères du prince Ferdinand, et les Bulgares apprécieront à sa valeur une telle concession ; mais ils s(mt trop avisés pour en être éblouis et pour oublier les raisons permanentes qui les incitent à une entente définitive avec les Serbes. Déjà, au printemps dernier, la Sobranié de Sofia a voté à l’unanimité la ratification de l’union douanière avec la Serbie ; le fait est caractéristique, il manifeste les tendances nouvelles qui l’emporteront sans doute, dans la péninsule, lorsque les nations balkaniques seront laissées libres de suivre leurs vrais intérêts et leurs penchans naturels. Les péripéties du conflit avec l’Autriche ont empêché les Serbes de ratifier, de leur côté, l’entente douanière ; mais l’histoire de cette année leur a trop bien appris combien ils ont besoin de ne pas rester isolés et de chercher un appui chez les autres peuples des Balkans, pour que la leçon puisse être perdue. Les intentions et les désirs du cabinet Pachitch et de la majorité de la Skoupchtina et du peuple serbe les portent à oublier certains souvenirs pénibles pour arriver à une entente avec la Bulgarie ; mais on doit comprendre, à Belgrade, la nécessité, vis-à-vis des Bulgares , d’éviter jusqu’aux apparences de procédés qui, dénaturés et exploités, — comme l’a été l’incident des décorations serbes données à des évêques grecs de Macédoine au moment où les bandes grecques exerçaient les pires violences sur les Bulgares en Macédoine et où les relations étaient rompues entre Athènes et Sofia, — risqueraient de retarder indéfiniment l’heure de l’entente. La Serbie ne saurait faire front de tous les côtés à la fois, et tout l’art de la politique consiste souvent à savoir choisir. Dans l’état actuel de l’Europe, il semble que ce soit vers le Danube et la Save, et surtout vers l’Adriatique, que la Serbie tende à orienter ses vues politiques et à porter toute son attention en prévision des événemens qu’elle y espère. Mais, par là, elle risque de se heurter aux intérêts autrichiens et, dès lors, elle a besoin d’une entente avec le Monténégro et surtout avec la Bulgarie dont elle serait bien avisée en ménageant les intérêts et les susceptibilités nationales en Macédoine.

La France, elle aussi, a un enseignement à tirer du conflit austro-serbe. Nous avons vu comment, sans compromettre nos bons rapports avec l’Autriche-Hongrie, nous avons pu, à la faveur des incidens de cette année, remporter pour notre industrie,