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dons qu’en fait historique comme en droit divin, c’est assez au Pape de confirmer ses frères sans les absorber. » Et un peu plus loin, les évêques affirment qu’ils commencent leurs travaux, « dans la plénitude de leur liberté. » Ce passage mérite l’attention. L’affirmation des évêques que « c’est assez au Pape de confirmer ses frères sans les absorber, » définit en termes remanjuables le caractère des rapports qui doivent exister entre l’épiscopat et le Saint-Siège. Sans doute l’union, l’unité sont le but que tous poursuivent et qu’ils sont sûrs d’atteindre, parce qu’ils sont décidés à faire pour cela tout ce qui sera nécessaire ; mais les évêques entendent donner un consentement libre. Ils sont « blessés » lorsqu’on les accuse de se conformer à la « passivité » d’un troupeau : et c’est bien l’accusation que M. Briand avait dirigée contre eux dans ses derniers discours au Sénat. M. Briand est un orateur très maître de lui. Il met dans sa parole beaucoup d’intentions diverses. Qui sait s’il ne s’est pas expressément proposé de provoquer la protestation que l’épiscopat a fait entendre ? Dans ce cas, il a eu gain de cause. Mais s’il a voulu et espéré davantage, et s’il a cru qu’en piquant l’épiscopat d’un aiguillon acéré, il l’amènerait à prononcer un mot ou à faire un geste qui pourraient être interprétés comme un commencement de désaccord avec Rome, il s’est trompé. Notre Église de France a toujours su rester unie à Rome sans se laisser « absorber. » Elle n’a rien perdu à travers les siècles de ses caractères distinctifs : il suffit de la mettre à l’épreuve pour qu’elle les manifeste de nouveau.

On comprend d’ailleurs fort bien que M. Briand soit embarrassé de l’attitude de l’Église : il en a donné des preuves très significatives. Nous sommes loin du temps, — et cependant il est d’hier, — où le gouvernement affirmait qu’il ne toucherait pas à la loi de 1905 ! Que le Pape le voulût ou non, il l’appliquerait tout entière, sans y rien changer et sans avoir besoin d’y rien ajouter ! Depuis qu’il parlait ainsi, il a fait la loi de 1907, dans l’espoir d’y trouver la solution de toutes les difficultés au milieu desquelles il se débat. Il ne s’en tiendra pas là : il fera peu à peu tout un code sur l’exercice du culte. Il ne peut plus échapper aux obligations qui s’imposent à lui ; il s’en rend compte et il l’avoue. Ce dont il se rend compte aussi, mais ce qu’il n’avoue pas, c’est que chaque loi nouvelle est déterminée par une résistance du Papo sur un point particulier et par une concession qu’on lui fait. Il se forme ainsi une législation spéciale qui, sans être un Concordat formel et surtout sans valoir l’ancien, ni pour l’Église, ni pour l’État, est cependant une œuvre où la volonté du Pape n’a pas moins de