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et l’expérimentation ; et plus encore, sciences historiques, politiques, sociologiques.

Il est reconnu que toute existence est assujettie, dans sa durée et sa continuité, à des changemens graduels, tels que chaque état présent des individus et des ensembles ou collectivités, envisagés en soi ou dans leurs produits, résulte du développement de leurs étals antérieurs. L’histoire, dans tous les ordres de faits, est celle d’un perpétuel écoulement, comme le disait déjà le vieil Héraclite.

Voici ce que nous appelons la théorie de l’évolution :

Evolution spontanée, produite par le jeu des agens naturels ;

Evolution artificielle, provoquée par l’art, la science, ou l’industrie humaine.

Evolution ascendante, c’est le progrès ;

Evolution descendante, et parfois régressive, c’est la décadence et la mort.

Le langage n’échappe pas à cette loi universelle, sous sa double forme :

Forme parlée, qui remonte aux origines obscures de l’humanité ;

Forme écrite, qui a marqué les débuts de nos civilisations. Le langage est la résultante de notre organisation, et de ses produits moraux et intellectuels. Les linguistes et les philologues s’efforcent d’en établir les phases réelles, — non plus désormais a priori, mais en fait, — par l’étude de chaque langue nationale, par celle de la langue française, en particulier.

Cependant, ils n’avaient pas accepté au début ces notions sur la relativité inévitable et la variabilité passée et future du langage ; moins encore sur le caractère spontané de ces variations.

Trop souvent, au lieu de constater simplement les variations historiques, trop lentes à leur gré, ils ont essayé, surtout depuis le XVIe siècle, de les provoquer systématiquement. Non contens de proposer les réformes à la conviction de leurs lecteurs et auditeurs, — ce qui est légitime, — ils ont cherché à les imposer par différentes méthodes. Cette prétention de soumettre toute connaissance et toute pratique à des conventions factices, proclamées comme des dogmes obligatoires, remonte aux institutions théocratiques du moyen âge.

Néanmoins, — à l’exception des langues telles que le sanscrit, qui a reçu une si forte empreinte artificielle des grammairiens, et