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est posé depuis longtemps. Or, on a constaté de bonne heure qu’il ne suffisait pas de noter le nombre de vibrations correspondant à l’émission d’un son donné, ni même leur intensité. En effet, les sons émis par la voix humaine sont complexes ; ils résultent de la superposition d’un nombre plus ou moins grand d’ondulations sonores, combinées entre elles, et spécialement avec leurs harmoniques. La multitude des sons est dès lors illimitée. C’est ce qui existe d’ailleurs en fait pour la voix humaine, d’après l’expérience courante , chacun reconnaissant à la voix ses parens et amis.

Il n’est donc pas permis de souscrire à l’espérance formulée par quelques philologues de pouvoir énumérer tous les sons possibles, et signaler chacun d’eux par une simple notation et dénomination.

Il en est à cet égard des sons comme des couleurs ; chaque couleur étant la résultante complexe d’une multitude d’ondulations lumineuses, de longueurs et d’intensités inégales, tout en produisant sur notre rétine, ou sur un cliché photographique, une impression unique.

De même chaque son agissant sur notre oreille, et sur nos enregistreurs physiques. Tout le monde sait qu’en pratique l’enregistrement de la voix est aujourd’hui réalisé par divers procédés, tels que l’emploi du phonographe, instrument réversible, susceptible de conserver la voix et de la reproduire.

On sait aussi comment la transmission de la voix articulée à distance se fait parle téléphone, et cela en vertu d’une série régulière de transformations mécaniques et électriques, qui ont frappé d’étonnement notre génération.

Il semble donc que l’on devrait pouvoir noter exactement la trace écrite de la prononciation des différens mots de la langue française ; on en donnerait ainsi une définition permanente. On avait même espéré pouvoir constituer ainsi à l’aide du phonographe une sorte de registre ou dictionnaire-type des prononciations de chaque mot, que l’on consulterait à volonté, en tout lieu et à toute époque. Ce registre s’appliquerait d’ailleurs à toutes les langues et dialectes, et même aux prononciations individuelles. Il pourrait être conçu à différens points de vue : comme purement empirique, ou bien comme résultat d’une analyse scientifique des sons. C’est ce qu’il convient de préciser davantage.