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MÉMOIRES
DE
LA COMTESSE DE BOIGNE

LES JOURNÉES DE JUILLET 1830[1]

Le lundi 26 juillet 1830, je me trouvais seule de ma famille à Paris, où je faisais arranger un logement dans la rue d’Anjou. Je parlais à des ouvriers, lorsque sur les premières heures, on vint me dire que le duc de Raguse était dans mon cabinet.

Je ne le voyais jamais le matin. Cependant comme il était établi à Saint-Cloud, cela ne m’inspira aucun étonnement. « Eh bien, me dit-il, on nous fait de belle besogne ! » Je crus à une plaisanterie sur les grogneries qu’il pouvait m’avoir entendu faire aux ouvriers. Je répondis en riant, et nous échangeâmes quelques phrases sans nous comprendre.

Mais bientôt, je reconnus mon erreur. Il avait la physionomie très altérée. Il me dit ces folles ordonnances ! Il me rapporta comment la nouvelle lui en était parvenue, à dix heures, par un

  1. L’extrait que nous publions des Mémoires de Mme de Boigne appartient au troisième volume de ces Mémoires, qui est sur le point de paraitre chez l’éditeur Pion. Mme de Boigne y raconte ce qu’elle a fait et ce qu’elle a vu pendant les journées de Juillet. Son récit, tout anecdotique, est un des plus vivans qui aient été écrits sur la Révolution de 1830.