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évêques d’avoir à dire leur mot dans les conflits politiques dont l’issue pouvait être une crise ministérielle et d’être nécessairement considérés, soit comme des frondeurs, soit comme des réactionnaires. Que l’Église eût des satisfactions de façade et, si l’on ose ainsi dire, des revanches de vanité, cela n’intéressait pas Geissel, non plus d’ailleurs que Diepenbrock. L’évêque de Breslau, qui avait passé sa vie en Bavière, savait ce que faisaient, à la Chambre de Munich, les membres de l’épiscopat ; ils étaient rapporteurs, parfois, sur des questions de notariat ou sur les affaires des eaux et forêts ; mais ils n’étaient pas arrivés, en trente ans, à obtenir l’exécution du Concordat ! A quoi bon, dès lors, pour un aussi mince résultat, habiller de pourpre, ou de violet, quelques chaises curules ? L’épiscopat prussien avait mieux à faire que de se mêler périodiquement aux jeux de la politique. S’il n’avait eu d’autre souci que de souligner la fin d’une période et le début d’une ère nouvelle, ou d’étaler aux yeux de ses fidèles, en guise de représailles, la splendeur renaissante de la puissance religieuse, il aurait accepté, comme un honneur fait à l’Eglise, la proposition du gouvernement ; mais derrière l’honneur, Geissel discernait un péril. Avant d’accepter le cadeau du Roi, il se demandait ce que le peuple penserait. L’enquête fut brève, la réponse formelle : l’épiscopat prussien, qui n’avait qu’à tendre la main pour posséder une parcelle de la puissance publique, refusa cette conquête imprévue.

Il ne convenait pas à Geissel et à ses collègues de faire, dans un Parlement, figure de minorité, ou d’être l’appoint d’une majorité ; mais, lorsque l’archevêque de Cologne s’en allait à Berlin entretenir le roi de Prusse ou ses ministres, on savait que derrière lui il y avait l’épiscopat prussien ; c’était là sa force, et cette force suffisait. Aussi consulter ses collègues, les grouper, les unifier, était pour Geissel un souci quotidien. L’assemblée de Wurzbourg avait inauguré quelque cohésion dans l’épiscopat allemand ; le concile de Cologne, en 1860, révéla ce qu’était une province ecclésiastique dûment organisée, et quelle harmonie unissait au métropolitain les suffragans, et comment tous ces vieux rouages, que les traités de droit canon démontaient pour les décrire, et qu’une longue négligence avait comme rouillés, pouvaient redevenir, très vite, des principes et des véhicules de vie.

Au-delà de la Prusse, Geissel regardait l’Allemagne. Il aimait que sa province ecclésiastique de Cologne fût considérée comme