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de joie parmi les patriotes, autant il excita d’indignation et souleva de colères dans le clan des harengères et des partisans de Senard. Les conciliabules entre la femme Sanson et Mogue reprirent de plus belle. De nouvelles intrigues se nouèrent. Cette fois, Senard en paya les frais. La Société populaire prit les devans. Elle ouvrit une enquête sur les événemens de pluviôse. Plus de vingt témoins furent entendus. Leur témoignage mit en pleine lumière, et le néant des imputations naguère dirigées contre Clément de Ris et Texier-Olivier, et l’indignité de Senard. Celui-ci fut exclu de la Société populaire, et, bientôt après, arrêté, il ne dut qu’à la protection de Mogue d’échapper à la guillotine.


IV

Le drame était fini. Seize mois plus tard, il devait avoir son épilogue. C’est, après la grande pièce, la petite pièce ; après la tragédie, la comédie, une comédie ne manquant pas de saveur.

Le 22 prairial an III (10 février 1795), Clément de Ris, en villégiature à sa campagne de Beauvais, y goûtait, après trois années de travail, d’agitations, et de perpétuels qui-vive, la satisfaction de s’appartenir un moment et d’appartenir à sa famille, quand il reçut une lettre datée de Paris, le 20 prairial, et ainsi conçue :

« Citoyen, vous vous rappelez l’époque désagréable où j’eus l’occasion de vous connaître. Sans vous retracer le détail de cet événement, on a poussé la malignité jusqu’à me soupçonner d’être votre dénonciateur. Il est intéressant pour moi, citoyen, que vous détruisiez ces soupçons et que vous attestiez le contraire. Je ne vous ai pas laissé à douter, dans le temps, quels ils étaient, et, lorsque je dînai avec vous chez le Représentant du peuple, le citoyen Garnier de Saintes, à Blois, ni vous ni lui n’en doutâtes, et la lettre dont je fus chargé pour le citoyen Louis du Bas-Rhin, dictée en ma présence, en contenait la preuve la moins équivoque. Je vous demande donc, citoyen, de m’envoyer le plus tôt possible un écrit qui détruise ces injustes imputations sur ma moralité, et rende compte de ma conduite à votre égard. Je ne crois pas avoir démérité votre estime. Ma liberté dépendra de votre réponse et de la célérité que vous