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importante, mais ils se lamentent toujours de n’y rien gagner. De mauvaises relations avec la France non seulement ouvrent la porte à une guerre européenne, mais aussi à la révolution ; et c’est peut-être la partie la plus sérieuse et la plus dangereuse de l’affaire. L’Angleterre ne demande rien à l’Empereur, sinon de maintenir le statu quo en Europe et dans une grande partie de l’Asie. À Paris, on n’est pas aussi ému de la visite de l’Empereur qu’on aurait dû l’être, mais on s’est mis dans la tête l’idée flatteuse qu’il avait fait un fiasco, ce qui n’est pas vrai ; car le Tsar a jusqu’ici plutôt réussi : il a convaincu les gens en Angleterre qu’il est un homme doux et d’un bon naturel, que ni lui ni son empire n’ont d’ambition. Il est grandement temps que je termine mon énorme griffonnage. Pardonnez-le-moi. Je reste toujours votre oncle dévoué.


La reine Victoria au roi des Belges.


Osborne House, 17 octobre 1844.

Mon très cher oncle,

J’avais l’intention de vous écrire lundi, mais depuis vous aurez appris que je fus trop bousculée ce jour-là, pour pouvoir le faire. La visite du Roi[1] s’est passée dans la perfection et je regrette beaucoup, extrêmement, qu’elle soit terminée. Il fut enchanté et fut reçu avec enthousiasme et affection, partout où il se montra… Quel homme extraordinaire que le Roi ! Quelle merveilleuse mémoire, que de vitalité, quel jugement ! Il nous parla à tous très franchement, et est décidé à ce que nos affaires continuent à aller bien. Il souhaite que Tahiti soit au fond de la mer… Le Roi fit mille éloges de mon très cher Albert ; il rend pleinement hommage à ses grandes qualités et à ses talens ; et, ce qui m’a particulièrement touchée, il le traite tout à fait comme son égal, l’appelant mon frère, me dit que mon mari et la Reine ne font qu’un à ses yeux, — ce qui est la vérité, — et ajoute : « Le prince Albert, c’est pour moi le roi. » Le Roi est très triste de partir, mais il est décidé, dit-il, à me revoir tous les ans… Je suis certaine que cette visite, et tout ce qui s’y rattache, ne peut faire que le plus grand bien…………. ;

  1. Louis-Philippe.