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considérations élevées et quasi prophétiques. Le professeur comte Stanislas Tarnowski lui a consacré, dans l’Œsterreichische Rundchau, une étude remarquable à laquelle je me permettrai d’emprunter quelques passages importans. Le comte Tarnowski, relevant les connaissances spéciales de Klaczko en art et en littérature, dit que sa vocation initiale était pour les études littéraires et qu’elle lui aurait assuré une place d’honneur parmi les grands critiques et les meilleurs esthéticiens de ce temps, s’il n’eût été avant tout Polonais. « Il était jeune, dit-il, dans les années où tous les cœurs bien nés, battant en Europe de foi et d’espérance, croyaient que le progrès et la liberté allaient résoudre tous les problèmes ; où tous ceux qui pensaient noblement en Pologne, voyaient éclore l’ère tant attendue de la renaissance polonaise. En communauté d’idées avec sa génération, Klaczko vivait dans l’attente de ce qui allait arriver. Il ressentait douloureusement chaque réalité, de même qu’il prenait part à toute ambition et à toute aspiration généreuse. Il était sensible à l’excès, et chaque douleur, chaque désir patriotique prirent dans son âme, plus que dans toutes celles de ses compatriotes, un caractère ardent et passionné. La cause de la Pologne était pour lui non seulement celle d’une nation, mais la lutte du bien contre le mal, du droit contre la force, du juste contre l’injuste. Voilà pourquoi il ne resta pas seulement l’adorateur enthousiaste de la beauté dans les olympiques régions de la poésie et de l’art, mais il descendit dans les champs poussiéreux et épineux de la politique ; et lui, qui semblait prédestiné à être surtout un grand connaisseur, admirateur et propagateur de la beauté artistique, devint aussi l’un des plus grands écrivains politiques du XIXe siècle, non seulement en Pologne, mais encore en Europe. »

J’ai relu attentivement ses nombreux écrits et je puis attester que le jugement du comte Tarnowski n’a rien d’exagéré. C’est naturellement la Pologne et ses infortunes qui tout d’abord firent connaître le talent de Klaczko dans la Revue. Il y était entré en novembre 1861, sous le pseudonyme de Constantin Gaszinski, et il y avait publié deux élégies polonaises : le Dernier et Sur la Glose de Sainte Thérèse du poète anonyme de la Pologne. Deux mois après, il signait de son nom véritable « Julian Klaczko » l’étude émouvante sur la Poésie polonaise au XIXe siècle et son influence sur le mouvement des esprits en 1861. Il avait préludé en 1842 à ces travaux poétiques par une édition de