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législation des banques, dont nous avons montré les défauts ? Les chemins de fer seront-ils soustraits à la législation des États particuliers pour dépendre davantage de la Confédération ? Des limites seront-elles posées à l’extension des grandes combinaisons industrielles ? Un avenir prochain nous le dira. Mais les événemens auxquels nous venons d’assister suffisent pour nous permettre d’en tirer des leçons bien instructives. Au milieu de cet ouragan déchaîné dans le Nouveau Monde, et dont les élans furieux se faisaient sentir à nous comme les vagues immenses venues du large qui battent nos côtes du Finistère et de la Gascogne, quelle a été la situation de notre pays ?

La France, calme pendant l’orage comme elle l’avait été dans l’excitation et la fièvre de la prospérité, a vu son commerce et son industrie suivre un cours normal. Ses marchés financiers n’ont pu rester tout à fait insensibles à la tempête ; mais celle-ci n’a entamé en rien la solidité de son organisme, les capitaux n’ont pas cessé d’être abondans, et l’escompte commercial de se pratiquer à des taux extrêmement modérés. Aucune des banques françaises n’a vu mettre en doute sa solvabilité ; aucune entreprise industrielle n’a dû arrêter sa marche. La Banque de France non seulement a continué à donner au commerce national toutes les ressources dont il a besoin, mais elle a pu envoyer de l’or à Londres et de là en Amérique : c’est vers elle que sont tournés tous les yeux, c’est d’elle que l’on attend aide et secours. Appuyés sur elle, nos grands établissemens de crédit jouent un rôle considérable dans la conduite des affaires financières de l’univers : ils interviennent sur les marchés du dehors en y apportant une fraction du capital dont ils disposent et auquel ils assurent une très large rémunération, sans se départir des principes de prudence auxquels leur clientèle aussi fidèle que nombreuse sait qu’ils sont attachés.

Quel enseignement se dégage de cette situation privilégiée, récompense de la sagesse de ceux qui sont à la tête des principales entreprises du pays, de l’esprit de modération et de prévoyance qui les inspire ! On leur a parfois reproché une certaine timidité : ils n’ont pas en effet l’audace américaine ; ils n’ont pas non plus à créer de toutes pièces l’outillage d’un pays neuf ; à des circonstances différentes, il faut d’autres hommes et d’autres idées, Comment ne pas être frappé du spectacle que donne notre pays, en face de l’ébranlement des autres marchés, et comment ne pas