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l’entente autrichienne. La méthode appliquée depuis 1903 en Macédoine et définie dans le programme de Mürzsteg fut déclarée insuffisante. L’Autriche, disait-on, ne permettrait jamais que l’on fît des réformes sérieuses en Macédoine : son entente avec Yildiz-Kiosk n’en était-elle pas la preuve ? La concession du chemin de fer n’était-elle pas précisément le prix de son abstention ? Et puisque l’Autriche, en recherchant des avantages particuliers dans les Balkans, se mettait en contradiction au moins avec l’esprit des accords de 1897 et de 1903, il fallait saisir cette occasion de renoncer à une entente préjudiciable aux vrais intérêts de la Russie, s’entendre directement avec le groupe des puissances occidentales et régler la question macédonienne, non plus en tête à tête avec l’Autriche, mais d’un commun accord avec les six grandes puissances.

L’entente qui liait, depuis 1897, la Russie à l’Autriche-Hongrie, pour les affaires balkaniques, a donc virtuellement pris fin. Sans doute, il n’y a pas rupture, et, depuis lors, la diplomatie des deux pays s’est appliquée à « ramasser le fil ; » mais les combinaisons diplomatiques ne survivent pas aux conditions qui les ont fait naître ; qu’on le regrette ou qu’on s’en réjouisse, les rapports de Vienne avec Pétersbourg ne sont plus aujourd’hui ce qu’ils étaient hier : l’association à deux est morte. La note russe, sur les réformes à appliquer en Macédoine, a été, à la vérité, communiquée d’abord au Cabinet de Vienne : simple courtoisie, puisque cette note elle-même émane non plus de l’association austro-russe, mais de la Russie seule. Si, comme il ne serait pas invraisemblable de le supposer, le gouvernement de Guillaume II a encouragé celui de François-Joseph à pousser en avant sa politique de chemins de fer, pour faire entendre peut-être à la Russie que, dans les Balkans, le concours de la Triple Alliance lui est indispensable, il aurait alors manqué son but ; il aurait rejeté la Russie vers l’Angleterre, avec qui elle achève de se réconcilier, et vers la France.


III

La Russie, atteinte dans son amour-propre, alarmée dans ses intérêts, fit un geste naturel de riposte. M. Isvolski chercha à remporter à son tour un succès dans la politique des chemins de fer. Depuis longtemps, les petits États balkaniques sont en