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(vers 1852). » Il commença par inviter ces petits vagabonds, que les Américains qualifient d’Arabes, à des réunions du dimanche, où il leur lut des passages de la Bible, qu’il accompagnait d’exhortations familières. Mais ces sermons laïques n’eurent aucun succès. Il recourut alors à une autre méthode : il créa pour ces pauvres enfans sans foyer un asile de nuit, où, moyennant la modique somme de 20 à 23 centimes, il leur donnait bon souper et bon gîte. Après s’être tenus quelque temps sur leurs gardes, ces petits nomades, pressés par la faim et le froid, y vinrent de plus en plus nombreux. Au souper, il avait avec eux une causerie familière, paternelle. Un jour, il les informa qu’on lui avait offert une place de commis, à 3 dollars par semaine. Pas un d’eux, hélas ! ne savait écrire. Il leur proposa alors d’ouvrir une école du soir, qui fut acceptée avec empressement et les mit en état de remplir de tels emplois. Enfin, à l’occasion de l’enterrement d’un homme célèbre, mort prématurément, il reprit la première idée d’un Sunday meeting qui, cette fois-ci, trouva de l’écho chez ces sauvages, déjà humanisés par sa bonté et par un commencement d’instruction. Dès lors, l’institution des « Logemens d’enfans abandonnés » devint populaire : elle ne fit que croître et embellir. En 1874, elle s’installait dans un beau local, du 4e quartier de New-York, au carrefour de cinq rues passagères ; aujourd’hui, elle a son Office central, 4e rue, près de la place Lafayette.

Dès 1854, M. L. Brace, s’inspirant de l’axiome du fondateur de Mettray : « améliorer l’homme par la terre et la terre par l’homme, » expédiait ces petits vagabonds, au fur et à mesure qu’ils étaient un peu disciplinés et instruits, » dans les États d’Illinois, Michigan, Missouri, chez des cultivateurs. Dans les vingt premières années, pas moins de 32 400 de ces « Arabes » furent soustraits à la contagion des grandes villes et reçurent chez des fermiers, à la fois, le bienfait de la vie de famille et l’apprentissage de l’agriculture.

La « Société pour empêcher les cruautés commises sur les enfans, » qui, en certaines villes, à Chicago par exemple, a pris le nom de Société humaine[1], a entrepris, depuis quelques années, de patronner les mineurs de seize ans, traduits devant les tribunaux. Elle y joue un rôle analogue à nos « Comités de défense

  1. Elle a pour président M. John Shorthall, avocat, et publie un bulletin mensuel appelé « Humane Advocate ».