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porte de leur part un certain nombre d’engagemens. Leur adhésion à l’Union intéresse l’avenir ; il fallait pourvoir au présent ; c’était le plus pressé. Depuis la grève de 1906, les patrons ont opéré des majorations de salaires qui s’élèvent à 20 pour 100 : cependant, ils ont consenti à en faire encore quelques-unes au bénéfice de leurs ouvriers les plus humbles. Puis, ils ont posé un certain nombre de conditions qui leur paraissent « indispensables à l’existence de l’entreprise, » et ils ont demandé aux ouvriers d’y souscrire. Ces conditions sont : 1° la reconnaissance de l’autorité du chef de l’entreprise pour la direction des chantiers ; 2° le maintien de la journée normale de dix heures, du 1er mars au 31 octobre ; 3° l’équivalence du travail et du salaire. L’autorité du chef de l’entreprise va de soi, semble-t-il. On ne l’aurait pas contestée autrefois ; mais, depuis quelque temps, les syndicats ouvriers cèdent à des tendances et émettent des prétentions nouvelles : c’est à eux que la direction de l’entreprise doit appartenir, à eux qui représentent le travail, et non pas aux directeurs actuels qui, à les entendre, ne représentent que le capital. Les patrons ont beaucoup de peine aujourd’hui à lutter contre les empiétemens dont leur autorité est de plus en plus menacée ; ils luttent cependant, ils affirment leur droit. Quant au maintien de la journée de dix heures pendant huit mois de l’année, elle est certainement justifiée. En fait, la durée du travail est assez souvent diminuée par des accidens de climat et elle est sensiblement réduite pendant la morte-saison. On ne peut pas comparer le travail en plein air, que tant de causes interrompent ou ralentissent, au travail régulier que l’ouvrier fait dans les lieux couverts et dans les mines. La moyenne du travail pour le maçon, si on la prend sur l’ensemble de l’année, est très probablement inférieure à celle que fournissent les autres ouvriers. Mais les syndicats ne veulent rien entendre : pour eux, le travail de neuf heures est devenu un dogme. Enfin les patrons ont été obligés de poser un nouveau principe, celui de l’équivalence du travail et du salaire. Les ouvriers prétendent obtenir tous le même salaire, qu’ils soient laborieux ou paresseux, intelligens ou inintelligens, et enfin qu’ils travaillent dix heures, ou neuf, ou moins encore. Qu’on leur assure un minimum de salaire pour un minimum de travail, soit ; mais, cela fait, c’est-à-dire la vie matérielle strictement assurée, il est naturel et légitime que chacun soit récompensé suivant ses mérites, et payé suivant son travail. L’article 5 du règlement de chantier porte : « Les ouvriers devront produire une somme de travail en rapport avec le salaire payé. » Et l’article 6 dit : « Il ne sera payé à l’ouvrier que