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Le besoin est urgent de faire de grands efforts pour les former moralement et intellectuellement. »

Le parti socialiste semble définitivement organisé. Le mécontentement, qui se manifestait tout d’abord sur quelques points, éclate maintenant partout et devient plus intense. Il existe des journaux et des revues rédigés exclusivement pour la propagation des doctrines socialistes. Leur organe reconnu est le Heimin-Shinbun, dont les numéros, quoique souvent confisqués, en sont d’autant plus recherchés le lendemain et lus avec plus d’avidité. La même chose se passe pour le Heimin-Shugi. Un volume récemment publié par la Société Ryuba contient la reproduction d’articles écrits dans le courant des trois dernières années par Kotoku-Shurai pour les journaux le Heimin-Shinbun, le Chokuga-Hikari et le Nichi-Bei de San Francisco. Ce livre fut interdit par le ministère de l’Intérieur et la circulation prohibée ; mais cette interdiction n’empêcha pas les idées qui y sont exprimées par un des écrivains les plus populaires en ce moment de se répandre. Le véritable leader du parti semble être M. Katayama-Sen, le premier Japonais qui se soit occupé de la question et qui ait étudié les écrits des fondateurs du socialisme. Il a vécu assez longtemps en Amérique pour y voir l’organisation des sociétés ouvrières dans les États de l’Union. Ses amis, — et il en a beaucoup, — parlent de lui comme d’un homme très bien doué et quelque peu idéaliste.

A côté de ces ultra-radicaux, nous avons les modérés qui espèrent changer l’état actuel sans violence et qui proposent les moyens pacifiques, des compromis au lieu de grèves et de révolutions. Ils ont un journal, le Choya-Shinbun, et cherchent à fonder un grand club, le Ro-do-to-its-kai ou Association mutuelle du travail. A leur tête se trouve M. Naseby, ex-chef de la police et possesseur d’une fortune indépendante. Il y a d’autres associations, et de nouvelles se forment journellement. De plus, de nombreux clubs répandent des idées plus ou moins socialistes parmi les différentes classes.

Les Japonais sont d’incomparables imitateurs ; ils s’assimilent les idées d’autrui avec une rapidité surprenante ; et ils sont en outre d’un tempérament inflammable, ce qui explique les émeutes récentes qui menacent de recommencer avec plus de violence encore. Les gens du peuple réclament à grands cris plus de privilèges, et ils en sont arrivés au point de vouloir se les approprier