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l’amiable qu’on prenne auprès d’elle toutes les mesures ordonnées par les ministres...

« Sur ce, elle (Mme d’Hautefort) a lu votre dépêche et partie de la mienne.

« — Vos sentimens sont, m’a-t-elle dit, on ne peut plus honorables. Votre franchise appelle la mienne... mais, appelons M. de Brissac pour tenir conseil.

« M. de Brissac s’est exprimé comme Mme d’Hautefort : il a juré plusieurs fois qu’il ne savait rien, mais qu’il soupçonnait.

« Il a été plus atterré que Mme d’Hautefort.

« Après un long silence, j’ai repris la parole.

« — Allons, du courage, il faut enfin prendre son parti. Qui de vous deux se charge d’aller dire tout à la Duchesse ? (Long silence.)

« Il me semble que cela convient mieux à Mme d’Hautefort.

« — Oh ! oui, a dit M. de Brissac ; car, pour moi, je n’en aurais pas la force.

« — Je vais me dévouer, a dit Mme d’Hautefort.

« — Eh bien ! madame, lui ai-je répondu, prenez la lettre des ministres et tâchez de vous rappeler les motifs que je fais valoir pour que Mme la Duchesse prenne un parti...

« Mme d’Hautefort est rentrée au bout d’une heure avec le visage très altéré, et m’a dit :

« — Général, j’ai tout dit à Madame, elle a lu la lettre des ministres. Elle est extrêmement touchée de vos procédés, de vos sentimens. Elle a beaucoup pleuré, mais elle n’avoue rien.

« — Eh bien ! madame, que ferons-nous ? Faut-il que je dise qu’on m’envoie un successeur ?

« — Général, donnez-nous quelques jours, je vous en supplie.

« — Madame, je ne peux vous donner que jusqu’à dimanche cinq heures du soir. Si un parti n’est pas pris à ce moment, si on ne souffre pas que j’applique toutes les mesures ordonnées par MM. les ministres, je demande mon déplacement.

« — Général, nous ferons ce que nous pourrons.

« L’expression de la physionomie de Mme d’Hautefort me donne l’espérance qu’un dénouement est prochain...

« J’ai la confiance que nous atteindrons le but par des moyens honorables ; mais, soyez bien convaincus qu’ayant pris toutes les mesures pour être averti, je n’hésiterai plus, au moment