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Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 47.djvu/450

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l’intérêt de la France et de la République, les protéger contre eux-mêmes, nous protéger contre eux ? Les moyens ne manqueraient pas. Ils ont montré de dangereux chemins, comment on entre dans le sanctuaire, « comment on lève le voile qui doit toujours couvrir tout ce que l’on peut croire du droit des peuples et de celui des rois, qui ne s’accordent jamais mieux que dans le silence. » Mais qui donc fera des lois punissant les mauvais fabricans de lois ?

Je voudrais cependant finir sur une parole d’espoir, de sérénité. Aussi bien a-t-on le droit d’espérer beaucoup en cette terre de France qui déjà fit germer des moissons de grands serviteurs dans tous les ordres, dans tous les partis. Ces événemens du Midi ne portent-ils pas en eux-mêmes une lumière aveuglante, presque foudroyante ? Comment les parlementaires n’entendraient-ils pas d’aussi formidables leçons de choses ? On peut croire que, pendant quelque temps au moins, les moins scrupuleux, dans leur propre intérêt, n’oseront pas braver la conscience publique réveillée par tant d’abus, par les protestations de la misère. Les syndicats agricoles sont entrés en scène, ces syndicats qui renferment l’élite de la France rurale, une foule de talens, de forces, de dévouemens ignorés, qui sauront, si on ne les entrave point, chasser les vendeurs du temple, nous refaire une morale économique, et peut-être une morale sans épithète, que l’esprit d’altruisme a pénétrés, qui aiment le peuple des campagnes pour lui-même, comprennent que tous les intérêts sont solidaires, n’estiment pas que le devoir soit seulement ce qu’on exige des autres, ont empêché le bon sens national de sombrer tout à fait, et, à la politique de haine, substituent la politique de réconciliation, de concorde.


VICTOR DU BLED.