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Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 47.djvu/452

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II

A CHATENAT

En lui offrant sa dernière médaille.


Où donc est le Bonheur ? Où donc est la Justice ?
En vain, dans ta poignante et tendre anxiété,
T’appuyant sur le bras charmant de la Beauté,
Ta sûre conseillère et ta consolatrice,

Tu voulus, avec eux, construire l’édifice
Solide et clair, où grandirait l’Humanité :
Ils ont fui, comme fuit l’errante Vérité,
Sans que, même pour toi, le rêve s’accomplisse.

Martyr par tous les dons de l’âme et ceux du corps.
Par l’amour, la douleur, par l’angoisse infinie
Qui t’oppresse, devant le mal, comme un remords.

Tu payas assez cher la rançon du génie
Pour espérer revivre, après tant d’agonie.
Sous le nimbe des saints dans la gloire des morts.

23 mars 1907.


MICROCOSME


Depuis soixante ans que je vis
Dans ce grand miracle des choses,
Que d’images y sout écloses
Devant mes yeux inassouvis !

Fleurs de rêve aussitôt cueillies.
Que, sous mon front, le souvenir
Se délecte d’entretenir
Ou persistantes ou pâlies :

C’est un pêle-mêle où les morts
Sous les pieds des vivans s’entassent
En des décors changeans qui passent,
Teintés de joie ou de remords,