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LES
METTEURS EN SCÈNE


I

C’était l’heure du thé à l’hôtel Nouveau-Luxe.

Depuis quelques instans Jean Le Fanois se tenait à l’entrée d’un des petits salons à boiseries Louis XV qui donnent sur le vaste hall central. De taille moyenne, svelte et bien pris dans sa redingote de coupe irréprochable, il avait l’allure narquoise et légèrement impertinente du Parisien de bonne famille qui s’est frotté trop longtemps au monde exotique et bruyant des hôtels élégans et des cabarets ultra-chics. De temps à autre, cependant, sa figure pâle et nerveuse était assombrie par une expression d’inquiétude, qui se dissimulait mal sous le sourire insouciant avec lequel il saluait les personnes de sa connaissance.

Plusieurs fois il jeta un coup d’œil impatient sur sa montre ; puis son visage se rasséréna, et il s’avança d’un pas rapide à la rencontre d’une jeune fille qui venait de franchir le seuil du hall. Fine et élancée, dans son costume de ville d’une élégance sobre, elle avait, sur un cou long et gracile, une Jolie tête d’éphèbe, aux lèvres d’un rose très pâle, aux grands yeux clairs et transparens, sous un front intelligent qu’ombrageaient des cheveux d’un blond doux et indécis. Cherchant le jeune homme du regard, elle traversait seule la salle encombrée, avec la mine