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Page:Revue des Deux Mondes - 1908 - tome 47.djvu/712

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Celle-ci leva lentement la tête et le regarda en rougissant.

— Et votre promesse, l’avez-vous oubliée ? demanda-t-elle en souriant.

— Ma promesse ?

Les joues de Le Fanois se colorèrent.

Elle continuait à l’envisager avec ses yeux profonds et tendres, qui semblaient chercher à deviner ce qui se passait en lui. Puis, comme il se taisait toujours, et restait appuyé contre la cheminée, sans faire mine de s’approcher d’elle, elle pâlit subitement et se leva.

— Je vois que vous l’avez oubliée en effet, — tant pis ! dit-elle, en s’efforçant de prendre un ton enjoué, que démentaient ses pauvres yeux subitement voilés de larmes.

Le Fanois, au son de sa voix, se retourna brusquement, et s’avançant vers elle, lui saisit les poignets d’un geste violent et passionné.

— Non, non, je ne l’ai pas oubliée, je ne l’ai pas oubliée ! s’écria-t-il, en l’attirant vers lui.

Elle eut un petit cri d’effarement joyeux ; puis, au moment où elle allait céder à son étreinte, elle le regarda de nouveau, et se jeta en arrière, en le repoussant de toute la force de ses bras raidis.

— Mais qu’avez-vous, qu’avez-vous donc ? dit-elle d’un ton d’épouvante.

Le Fanois lui tenait toujours les poignets serrés entre ses doigts crispés, et ils restèrent ainsi, un instant, les yeux dans les yeux.

— Jean, qu’avez-vous ? Parlez, je vous en supplie ! répéta-t-elle, haletante.

Il lâcha brusquement ses mains, et se détourna d’elle avec un geste désespéré.

— J’ai.. que j’épouse la mère, dit-il en ricanant.


EDITH WHARTON.