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de confiance s’occupe spécialement des immigrans allemands venant de Russie. A la station frontière d’Illowo, ils sont hébergés gratuitement pendant une nuit, s’ils manifestent le désir de s’installer dans les colonies, comme propriétaires, fermiers ou travailleurs. Il fallut, au début, vaincre maints préjugés existans contre ces « pays sauvages » où l’on ne devait arriver qu’armés de fusils pour se défendre contre « les cosaques et les loups. » Des naufragés de toutes les classes, n’ayant aucune habitude du travail manuel, se présentèrent à la Commission qui se montra plus ou moins difficile. Aujourd’hui, elle écarte, en principe, tout homme qui « descend de cheval pour aller à âne » et prend, de préférence, celui qui fait son ascension sociale : paysans désirant avoir un bien plus grand, ouvriers agricoles accédant à la propriété, ouvriers industriels voulant retourner à la terre, émigrés allemands revenant dans la patrie : 24 pour 100 sont originaires de Posnanie et de Prusse occidentale, 20 pour 100 arrivent de Russie, les autres viennent de Westphalie, de Saxe, de Hanovre, de Brandebourg, de Poméranie et d’ailleurs. Ces provinces colonisées offrent le spectacle pittoresque d’une mosaïque de mœurs et de cultures de toute l’Allemagne. Les gens de l’Ouest et du Sud, d’esprit délié, apportent une grande somme de connaissances et d’expériences agricoles ; ils sont particulièrement experts dans le choix des semences. Le Westphalien, patient, économe, a introduit dans l’Est toutes les espèces de choux. Il excelle dans l’élevage des porcs ; le Poméranien dans celui des oies ; le Rhénan dans celui du bœuf de boucherie. Le Wurtembergeois, démocrate et particulariste, est arrivé avec son arbre fruitier, le Badois avec son pied de tabac, le Palatinois avec son pied de vigne. Le Prussien des bords de la Vistule, malingre et volontiers buveur de schnaps, est bon laboureur. L’immigrant est revenu de l’étranger avec sa ruche et s’adonne avec succès à l’éducation des abeilles.

Les colons sont tenus d’apporter un petit capital, avec lequel ils participent à la construction de leur habitation, et qui doit représenter de un tiers au deux cinquièmes de la valeur de la parcelle, ou quatorze fois la rente fixée à payer. Si cet avoir est insuffisant, le président de la Commission peut faire un prêt supplémentaire, à 3 et demi pour 100, du quart du capital présenté et remboursable en vingt ans. Le total des sommes apportées par les colons, de 1886 à 1906, dépasse 53 millions de marks.