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multiples d’un intérêt militaire immédiat doivent intervenir dans un temps extrêmement restreint, il serait avantageux, en vue de gagner du temps, que le ministre pût déléguer une partie de ses pouvoirs au chef d’état-major. Cette délégation ne serait pas permanente ; elle serait, quant à sa durée et à son étendue, subordonnée aux circonstances qui en démontreraient la nécessité et ne s’exercerait qu’après avoir été notifiée par le ministre aux autres chefs de service. »

Quel luxe de précautions ! Cette délégation de pouvoirs sera non seulement limitée en durée, mais aussi en étendue. C’est, une fois de plus, la consécration de l’indépendance des directions, que la phrase suivante met en relief : « Les nouvelles dispositions fortifient les moyens d’action du chef d’état-major général, sans cependant augmenter ses attributions d’ordre administratif. »

En somme, ce décret marque un pas en avant, mais combien timide ! On dirait vraiment que l’organisation de la flotte en vue du combat n’est qu’un hors-d’œuvre, un accessoire, une simple branche de l’administration. Or, la France n’a ni le monopole du bon sens, ni celui des justes attributions à répartir entre les services. Regardons autour de nous. Interrogeons sir John Fisher, premier lord naval de l’Amirauté anglaise, qui déploie tant d’énergie pour l’entraînement des escadres britanniques et leur concentration auprès des points où peut surgir le danger. Demandons-lui quel rang la préparation de la guerre navale occupe dans ses préoccupations. Posons la même question à l’amiral von Tirpitz, qui poursuit avec une ténacité indomptable l’exécution de programmes de plus en plus vastes. Inutile de faire une semblable demande à l’Italie car elle a reconnu la prépondérance absolue des questions de guerre et la nécessité d’élargir l’autorité du chef d’état-major : un décret royal, du 5 avril 1901, consacre en termes précis le nouveau rôle de ce haut fonctionnaire. Sous l’autorité du ministre, un vice-amiral exerce des fonctions multiples : préparation à la guerre navale ; maintien à leur plus haut degré d’efficacité des forces navales, des places maritimes, des dépôts de charbon, de munitions, de vivres et des navires auxiliaires ; étude des caractéristiques des unités à construire, des refontes à effectuer, des propositions relatives à la radiation des bâtimens vieillis ou dépourvus de valeur militaire ; contrôle des constructions neuves