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Léopold, et elle exprimera le ferme désir que l’amour de la paix et la haute intelligence du Roi empêcheront qu’il ne fasse entrer dans la politique européenne un élément de discorde si plein de périls[1]. »

Visconti-Venosta, beaucoup plus circonspect, exprima les mêmes désirs à Berlin et insista davantage à Madrid, bien qu’avec réserve encore. Il enjoignit à son représentant, Cerutti, de faire remarquer que, jusqu’à la décision des Cortès, tous les conseils pouvaient se produire : il était donc permis aux gouvernemens amis de l’Espagne d’appeler son attention sur l’extrême gravité d’une situation dont le dénouement pacifique dépendait uniquement de la sagesse et de l’esprit politique de ses représentans. Le ministre d’Italie devait insister sur la responsabilité redoutable qu’assumeraient les Cortès en élevant au trône un prince dont l’avènement serait le signal d’une guerre européenne ; il exprimerait au nom de son gouvernement la crainte qu’une monarchie, fondée sous de pareils auspices, loin de donner à l’Espagne la stabilité et le repos auxquels elle aspire, ne l’exposât à de nouvelles épreuves et à de nouveaux dangers[2]. Il était même autorisé à appuyer l’ambassadeur anglais et à rechercher jusqu’à quel point une action commune pourrait être combinée entre les deux diplomaties.

Les États allemands du Sud ne nous accordèrent pas l’assistance que Gramont attendait d’eux. Ils démontrèrent une fois de plus combien était aveugle la politique qui faisait un dogme de leur défense, et ils commencèrent dès lors à nous tourner le dos. La girouette du Wurtemberg, Varnbuhler, dont Saint-Vallier partageait trop docilement les impressions, commença à tourner. Quoique hors d’état de juger des motifs impérieux de notre déclaration du 6, il se permit de regretter « que le sentiment de notre bon droit ne nous eût pas conseillé plus de modération dans la forme, » et il feignit d’en éprouver un sentiment de stupeur et d’effroi. Bray, avec un sans-façon plus sincère, n’était pus plus encourageant. Il dit à Cadore : « Si la guerre éclatait entre la France et la Prusse, notre position serait très embarrassante, car, si d’une part il est certain que la question n’intéresse en aucune façon la Bavière, nous ne saurions d’autre part rester impassibles à l’invasion d’une armée française sur le

  1. Beust à de Munch, 6 juillet.
  2. Malaret à Gramont ; Layard à Granville ; Paget à Granville, 9 juillet.