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publique en France, dans l’excitation où elle est, aurait préféré une autre solution, la guerre, mais je reconnais que la renonciation est une solution satisfaisante, et qu’elle ôte tout prétexte de guerre, du moins pour le moment. » L’Empereur paraissait donc résolu à se contenter du retrait pur et simple de la candidature et n’avait fait aucune allusion à des garanties à demander au roi de Prusse. A la réception du télégramme de Nigra racontant cette conversation, Victor-Emmanuel, qui était revenu de la chasse à Turin, remonta dans la montagne. Le Bœuf survenant ensuite, l’Empereur lui tint le même langage, à ce point que, rentré au ministère, le maréchal réunit ses chefs de service, leur annonce qu’on a la paix et leur prescrit d’arrêter les dépenses extraordinaires. Notre attaché militaire à Vienne, le colonel de Bouille, alors en congé, averti de regagner son poste en toute hâte, venant prendre congé du ministre, celui-ci lui dit que l’affaire était arrangée, et qu’il pouvait différer son départ. Enfin Mac Mahon fut avisé de suspendre l’embarquement des troupes de l’Afrique.


III

Gramont, enfermé dans son cabinet, ne savait rien de ces agitations, de ces pourparlers, de ces va-et-vient. Prévoyant, d’après les avis reçus, que la candidature allait être retirée spontanément, sans l’ordre et le conseil du Roi, il télégraphie à Benedetti confidentiellement : « Employez votre habileté, je dirai même votre adresse, à constater que la renonciation du prince nous est annoncée, communiquée ou transmise par le roi de Prusse ou son gouvernement. C’est pour nous de la plus haute importance ; la participation du Roi doit à tout prix être consentie par lui ou résulter des faits d’une manière saisissable. » Il n’exigeait plus une participation directe et explicite ; il se contentait d’une participation indirecte et implicite résultant de la communication par le Roi du désistement du prince accompagnée de quelques bonnes paroles (12 juillet, 1 h. 40). Cette participation indirecte du Roi nous était assurée sans qu’il fût nécessaire d’employer ni adresse ni habileté. Cette excellente dépêche qui, restée la dernière expédiée, eût clos la crise à notre gloire, partait à peine que Gramont recevait lui aussi, de la main d’un envoyé du ministère de l’Intérieur, la