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LES CHANSONS DE GESTE
D’APRÈS M. JOSEPH BÉDIER[1]

La vieille épopée française du moyen âge devra aux livres de M. Joseph Bédier la grâce d’une jeunesse nouvelle. On trouve dans les deux volumes qu’il a fait paraître au cours de l’année dernière, et dont les lecteurs de la Revue connaissent quelques chapitres[2], le dessin d’une explication très originale des chansons de geste. L’auteur n’a cependant formulé aucune théorie : il s’est contenté, après de minutieuses études, de proposer des faits aussi nombreux et aussi probans que possible ; il n’a pas encore conclu, un peu par coquetterie, beaucoup par honnêteté. Mais la critique, elle, n’avait pas les mêmes raisons d’attendre. En tous pays où les études médiévales sont honorées, elle s’est tout de suite intéressée à la solution nouvelle donnée par M. Bédier à un problème qui touche en même temps l’histoire littéraire et l’histoire des mœurs. « Un souffle d’air frais, écrit avec enthousiasme un philologue étranger, passe sur les antiques broussailles des chansons de geste[3], » et, de son côté, le Journal des Savans[4]déclare que les Recherches sur la formation des légendes épiques sont « d’une originalité exquise. » Les livres de M. J. Bédier méritent cette attention et ces éloges : ils représentent un effort personnel et vigoureux pour mieux comprendre le passé, une belle œuvre de science exacte et parfois de poésie.

  1. Les Légendes épiques. Recherches sur la formation des chansons de geste, par M. Joseph Bédier, professeur au Collège de France, 2 vol. ; II. Champion.
  2. Voyez, dans la Revue des 15 mars et 1er avril 1907, les Légendes de Girard de Roussillon, par M. J. Bédier.
  3. Litteraturblatt für germanische und romanische Philologie, 1908, n° 6, art. de M. Ph. Aug. Becker.
  4. Mars 1909 (article de M. J. Flach).